Les élections européennes qui auront lieu dimanche 25 mai prochain font naître de nouveaux enjeux citoyens. Face au ras-le-bol général que pouvons-nous faire ? Certains évoquent le retour des extrêmes mais peu de personnes évoquent de cette initiative européenne menée par les féministes. Découverte du mouvement Féministes pour une Europe Solidaire.
- Anne Nègre
- Avocate, tête de liste pour Féministes pour une Europe Solidaire #FPES Euro-Région du Sud-Ouest
Le féminisme sonne souvent comme ringard, totalement dépassé. Pourtant jamais en France et dans l'ensemble des pays européens, le droit des femmes n'a été aussi fragilisé. Alors face à l'écart des salaires, aux chiffres scandaleux des 17% des femmes qui vivent sous le seuil de pauvreté, des voix ont commencé à se faire entendre. Elles viennent de partout. Des hommes, des femmes, tous ont des parcours différents mais tous se retrouvent sur un fait : si nous voulons une Europe démocratique, il faut défendre la place des femmes dans nos sociétés.
Pour comprendre ce mouvement, j'ai décidé de rencontrer Anne Nègre, elle est tête de liste pour l'Euro-Région du Sud-Ouest.
- Pourquoi avoir choisi de défendre ce mouvement et de vous engager à ses côtés ?
Anne Nègre : pensant sincèrement qu'ensemble tout est possible, j'ai décidé de m'engager avec "Féministes pour une Europe Solidaire". Tête de liste dans l'euro région Sud-Ouest, je souhaite m'engager auprès de tous les citoyens de cette région, pour que les choses bougent. Pour plus de solidarité, plus d'égalité !
- L'égalité, n'est-ce pas simple une utopie issue des mathématiques ?
Anne Nègre : Non. Elle existe, elle est possible. C'est mon combat depuis toujours comme avocate. L'égalité entre les femmes et les hommes grâce à notre combat féministe, à mon combat, est devenue une valeur fondamentale de la Constitution Européenne, article 1-2. Mais, c'est insuffisant, il convient que les droits des femmes soient spécifiquement intégrés dans la Charte des Droits Fondamentaux pour arrêter les régressions sur la contraception ou l'avortement par exemple.
- Après des années auprès du parti radical de gauche, pourquoi avoir choisi la voie féministe pour ces élections ?
Anne Nègre : Après avoir été de celles qui ont fait émerger en France l'idée de parité dès 1994 avec le Réseau Demain la Parité où j'étais mandatée par l'Association Française des Femmes Diplômées des Universités, AFFDU, Reconnue d'utilité publique, branche française d'une ONG présente dans 120 Pays (ensuite j'ai été présidente de l'une et vice présidente de l'autre), nous avons obtenu avec toutes les associations féminines et féministes et bien sur au delà, cette réforme de la constitution et les lois subséquentes. On a cru que c'était gagné cette égalité. Et là, stupéfaction, les partis importants ont préféré payer des contributions financières à l'état plutôt que la respecter pour le nombre de femmes aux élections, ils valident ces attitudes de non respect de la loi ce qui est dommageable dans le public. C'est légal mais non moral. Pour les sénatoriales par exemple, sont montées des listes dissidentes pour avoir bien un homme dans la liste officielle et un homme en dissidence en tête de liste, les deux sont élus. Deux mois après, les dissidents reviennent dans leur parti généralement. Les têtes de listes sont massivement des hommes etc. Ce sont des pratiques anormales qui seraient fustigées dans les pays anglo-saxons. Dans le PRG, la parité est une façade même si elle est dans les statuts, elle est contrainte. Les programmes sont oublieux de ces questions, 5 minutes de paroles aux congrès, quelques tribunes mais sans effet certain. Les présidents de fédérations sont presqu'uniquement des hommes comme ce sont eux qui proposent les candidats aux investitures… J'ai pu constaté aussi que les personnes qui portent des propositions autres, différentes, avec de vraies compétences partent généralement rapidement des partis politiques qui ne sont pas des lieux de réflexion et de synthèse vers l'action.
- L'égalité, slogan de notre République n'a donc qu'une existence de surface ?
Anne Nègre : Les féministes, nous avons constaté que nous avons eu cette même expérience dans tous les partis. Et nous sommes partis ans nous concerter mais c'est quand même étonnant d'avoir toute la même réaction. Le PRG bénéficiant d'un accord avec le PS, il n'est pas astreint directement à la parité. Au comité directeur du 30 novembre 2011 du PRG, il est apparu que sur les 55 circonscriptions environ dans l'accord projeté pour les élections législatives, seules les 5 députées sortantes étaient investies. Pas une seule autre femme. Cela n'avait aucun sens. On remarque paradoxalement que les ministres radicaux au gouvernement sont des femmes, le PS a surtout des hommes a placé comme ministres, la variable d'ajustement pour la parité devienne les femmes des partis alliés.
- L'égalité est un combat humaniste pour vous ?
Anne Nègre : A ce jour, mes idées sont toujours radicales, Humanisme, Laïcité et Solidarité, j'ai de nombreux amis radicaux, mais le fonctionnement de ce parti et des autres, nous imposent cette démarche de créer nos propres partis à l'échelon national, européen et pourquoi pas mondial. De nombreux amis hors Union Européenne suivent notre aventure avec grand intérêt.
- Croyez-vous que le droit à l'avortement ou à la contraception soit essentiel dans cette campagne ?
Anne Nègre : La contraception est à développer, intensifier, sous toutes ses formes, des informations auprès des jeunes et des moins jeunes sur la pilule du lendemain, avoir des financements pour des recherches permettant une solution viable et pérenne de la contraception féminine mais aussi masculine. Mais toutes ces politiques sont peu existantes et celles qui restent disparaissent faute de crédit. Ce qui est un point commun à toute l'Europe. L'échec de la contraception est souvent lié à des conditions de vie difficiles, à une absence d'accès aux soins médicaux, car là encore c'est couteux, c'est compliqué. Nos sociétés sont complexes.
- Que masque cette complexité ? Que nous faut-il voir ?
Anne Nègre : C'est assez simple. Pour une femme qui porte un enfant parce qu'elle n'a pas eu le choix. Il s'en suit souvent une absence de père et un rejet des familles, c'est toujours actuel. L'impossibilité de faire face psychologiquement à une telle détresse qui pour d'autres est le plus bel accomplissement de la vie ? Financièrement une trappe sans appel vous happant vers la pauvreté, le désespoir, l'impossibilité d'élever cet enfant à venir. Nous ne sommes pas égales devant la détresse et les malheurs de la vie. Il ne nous appartient pas de juger mais d'aider et de permettre à ces femmes à toutes les femmes "d'avoir un enfant si je veux, quand je veux". Il est un constat sans appel que ce sont les femmes qui portent les enfants. Encore pour quelque temps.
Il est un autre constat, ce sont les femmes qui se retrouvent seules face à une grossesse non désirée. Et ce sont ces mêmes femmes qui doivent pouvoir bénéficier de la maitrise de la fécondité, de pouvoir avorter si elles le veulent dans les meilleures conditions médicales possibles. On a oublié ces drames de ces femmes qui avortaient seules et mourraient, la mort rode, il faut l'éloigner.
L'humanisme cherche à défendre les droits pour toutes et tous et particulièrement ceux liés aux soins. Privés les femmes de ces soins, c'est les priver de leur liberté fondamentale.
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