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  • Les médias occidentaux face à la montée des tensions USA-Chine : enfin un appel à la lucidité


    Enfin une bonne nouvelle dans les médias occidentaux. Enfin un peu de lucidité sur la période que nous traversons et le bruit médiatique dangereux vis-à-vis de la relation USA-Chine.

    L’analyse de Jeffrey Sachs (voir sa bio ici) dans une récente interview révèle une vérité que beaucoup de médias occidentaux semblent ignorer ou minimiser : la montée des tensions entre les États-Unis et la Chine n’est pas une fatalité inéluctable. Elle résulte principalement d’une stratégie américaine visant à contenir l’ascension de la Chine. Dans ce contexte, il est impératif que les médias occidentaux cessent de servir de relais à une rhétorique belliciste et adoptent une approche critique et équilibrée.

     

    Une politique de harcèlement déguisée

    Comme le souligne Sachs, la Chine n’a aucun intérêt à initier un conflit avec les États-Unis. Pourtant, elle est encerclée par des bases militaires américaines en Asie-Pacifique, et ses routes maritimes vitales sont constamment sous pression. Loin d’être une menace militaire directe, la Chine est avant tout préoccupée par sa stabilité interne et sa croissance économique. En insistant sur une vision manichéenne où la Chine est l’ennemi par défaut, les médias occidentaux masquent cette réalité et alimentent une peur irrationnelle.

     

    Une interdépendance économique occultée

    L’un des points forts de l’argumentation de Sachs est l’interdépendance économique entre les États-Unis et la Chine. Les États-Unis bénéficient massivement de leurs relations commerciales avec la Chine, notamment par l’accès à des produits à moindre coût et à des chaînes d’approvisionnement mondiales. Pourtant, cet aspect est souvent éclipsé dans les discours médiatiques au profit de récits de concurrence et de protectionnisme.

     

    Taïwan : une ligne rouge à ne pas franchir

    Jeffery Sachs met également en garde contre les dangers d’une ingérence américaine dans la question de Taïwan. Comparant cette situation à celle de l’Ukraine, il avertit que transformer Taïwan en théâtre de guerre entre grandes puissances aurait des conséquences désastreuses pour toutes les parties concernées. Les médias occidentaux doivent prendre conscience que la promotion d’une telle escalade ne sert ni les intérêts américains, ni ceux des Taïwanais.

     

    Une responsabilité médiatique

    Les médias occidentaux ont un rôle crucial à jouer dans la déconstruction de la propagande belliciste. En continuant à amplifier les discours alarmistes et les préjugés anti-chinois, ils trahissent leur responsabilité première : informer avec rigueur et honnêteté. L’appel de Sachs à une coopération sino-américaine pour relever les défis mondiaux, comme le changement climatique, offre une alternative réaliste et constructive. Les médias devraient mettre en lumière ces perspectives plutôt que de se laisser entraîner dans une logique de confrontation.

     

    Une chance pour la paix

    Enfin, il est temps de reconnaître que la compétition entre les États-Unis et la Chine ne doit pas être un jeu à somme nulle. Le commerce, la science et la culture ont montré qu’ils pouvaient être des terrains de collaboration fructueuse. Plutôt que de se positionner en soutien aveugle à une politique américaine souvent contradictoire, les médias occidentaux devraient œuvrer pour un discours équilibré, capable de contribuer à la paix mondiale.

    La voix rationnelle et mesurée de Jeffrey Sachs rappelle que l’histoire n’est pas écrite d’avance. Il revient aux médias de choisir : être complices de l’escalade ou devenir les artisans d’une compréhension mutuelle et d’un dialogue apaisé.

  • Un « gouvernement d’intérêt général » : solution ou piège pour la démocratie française ?

    Dans la soirée du 4 décembre 2024, la motion de censure a été votée à l'Assemblée nationale, faisant de facto tomber le gouvernement sous la direction du Premier ministre Michel Barnier. En réponse à cette agitation politique, le Président Emmanuel Macron a pris la parole le jeudi 5 décembre à 20h. Comme on peut le voir sur le site officiel de l’Elysée, il s’agit d’une « adresse aux Français ». Face à une Assemblée nationale sans majorité et la censure inédite du gouvernement, le président appelle à la formation d’un « gouvernement d’intérêt général ». Si cette idée se veut une réponse pragmatique à la crise, elle soulève des questions fondamentales sur le fonctionnement démocratique de la Cinquième République.

    Comme cela fait longtemps que je ne me suis pas prêtée à l’analyse des discours d’Emmanuel Macron, il me semble important de le faire aujourd’hui afin de poser clairement la question de la signification de l’expression de « gouvernement d’intérêt général ».


    Une rhétorique de l’urgence et de l’unité

    Le discours s’ouvre sur une situation exceptionnelle : la censure du gouvernement Barnier et l’impossibilité de dégager une majorité parlementaire claire. Macron mobilise une rhétorique de l’urgence pour justifier la nécessité d’une solution rapide. En présentant les oppositions comme un « front anti-républicain », il se positionne en garant de l’unité nationale et de la stabilité institutionnelle.

    Ce qui, comme le souligne Clément Viktorovitch, est factuellement faux, et qui le positionne comme le seul sauveur. Cette rhétorique disqualifie tout contre-pouvoir. Elle renvoie dos à dos les extrêmes, marginalise les critiques légitimes et ignore le rôle de l’opposition dans une démocratie pluraliste. Comme l’a montré Chantal Mouffe (The Democratic Paradox), un consensus total est une illusion qui masque souvent la suppression des conflits légitimes.

    Le recours au pathos est également frappant. Macron évoque les fêtes de Noël pour accentuer la responsabilité supposée des oppositions dans la crise. Cette stratégie émotionnelle sert à polariser le discours, renforçant son positionnement de « père de la Nation ». Toutefois, en établissant cette dualité simpliste entre « ordre » et « chaos », il empêche une véritable délibération publique.

     

    Le « gouvernement d’intérêt général » : une idée constitutionnellement fragile

    Le concept n’a pas de fondement explicite dans le droit constitutionnel français. La Constitution de 1958, pensée pour assurer la stabilité, repose sur la séparation des pouvoirs et le jeu des majorités parlementaires. Si l’article 49 permet de contourner les blocages, il ne saurait être un outil systématique pour gouverner. L’appel à un « gouvernement d’intérêt général » repose donc davantage sur une interprétation politique que sur une base juridique solide.

    Un tel gouvernement, en prétendant représenter toutes les forces politiques, pourrait affaiblir l’opposition et concentrer le pouvoir dans les mains de l’exécutif. Cette dynamique peut mener à ce que Pierre Rosanvallon appelle une « démocratie d’évitement », où les mécanismes de délibération collective sont contournés au profit d’une gestion technocratique (Le Bon Gouvernement).

    La fragilité institutionnelle de ce concept est également à replacer dans le contexte international. Contrairement à des pays comme l’Allemagne où les coalitions sont courantes, la Cinquième République française repose sur un fonctionnement binaire : majorité et opposition. Forcer un consensus artificiel pourrait créer davantage de tensions que de stabilité.

     

    Une illusion dangereuse : entre autoritarisme et désengagement populaire

    Le projet d’unité nationale masque les tensions inhérentes à toute démocratie. Comme le souligne Claude Lefort (Essais sur le politique), la démocratie vit de ses divisions et de ses conflits. Chercher à les effacer revient à nier le pluralisme, socle de toute société libre.

    Le risque est celui d’un glissement vers un pouvoir technocratique ou autoritaire. En neutralisant les clivages politiques, le gouvernement pourrait être tenté d’agir sans réel contre-pouvoir, affaiblissant le rôle du Parlement. Hannah Arendt rappelle que de telles situations peuvent conduire à une érosion progressive des libertés (Les Origines du Totalitarisme).

    Un gouvernement d’intérêt général peut également renforcer la défiance envers les institutions. Déjà en crise, la représentation politique risque de s’éloigner davantage des citoyens, laissant place à un cynisme dangereux. La philosophie politique contemporaine, notamment Habermas (Droit et démocratie), insiste sur l’importance de la participation citoyenne et du débat public pour légitimer les décisions.

    Dans ce contexte, les médias jouent un rôle crucial. En reprenant la rhétorique d’urgence sans la nuancer, ils risquent d’accentuer la perception d’un éloignement entre gouvernants et gouvernés. Cela soulève des questions sur leur responsabilité dans l’érosion de la confiance publique.



    Quels choix pour l’avenir démocratique ?

    Le discours présidentiel pose une question essentielle : comment gouverner dans un contexte de fragmentation politique ? Si le « gouvernement d’intérêt général » peut sembler une réponse pragmatique, il ne saurait être une solution pérenne.

    La crise actuelle révèle les limites de la Cinquième République. Une réforme institutionnelle pourrait renforcer la proportionnalité des élections législatives, favorisant une meilleure représentation des forces politiques. Une réflexion sur l’instauration d’un régime parlementaire plus équilibré semble également nécessaire.

    Face à la défiance croissante, il est urgent de restaurer la confiance des citoyens dans les institutions. Cela passe par une démocratisation des processus décisionnels et une plus grande transparence. Inspirons-nous des expériences participatives réussies, comme les assemblées citoyennes, qui permettent d’inclure les citoyens dans l’élaboration des politiques publiques.

    Dans cette perspective, Dominique Motte propose un modèle de démocratie directe qui mériterait une exploration approfondie pour répondre à la crise actuelle.



    L’unité, un leurre ou une ambition ?

    Si l’idée d’un « gouvernement d’intérêt général » semble répondre aux blocages institutionnels, elle cache des dangers profonds pour la démocratie. En niant les conflits inhérents au politique, elle risque de renforcer les dynamiques autoritaires et de creuser la fracture entre gouvernants et gouvernés.

    La France ne peut se contenter de solutions provisoires. Elle doit repenser ses institutions et réaffirmer le rôle central du citoyen dans la construction démocratique. Comme l’écrivait Rousseau, « la force publique est composée des forces privées : si elle est mal dirigée, elle détruit l’égalité ». Gardons cela à l’esprit en ces temps troublés.

    Et, comme le souligne Hannah Arendt, « L’action, par définition, ne peut se produire dans l’isolement. Elle a besoin des autres pour se manifester » (Condition de l’homme moderne). Plutôt que de chercher à éviter les conflits, assumons-les pour les transformer en moteur de notre avenir collectif.



  • Soixante ans d'amitié franco-chinoise célébrés à Paris : une soirée historique sous le signe de l'émotion et de la reconnaissance

    Chine, Prix, Ambassade, amitiés, diplomatieCe mardi 4 décembre 2024, l’ambassade de la République populaire de Chine à Paris a vibré au rythme d’une célébration marquant six décennies de relations diplomatiques entre la France et la Chine. Une soirée qui, au-delà des discours, a mis à l’honneur les liens profonds et variés qui unissent ces deux nations depuis soixante ans.

    L’ambassadeur de Chine en France, Lu Shaye, a ouvert la soirée par un discours remarqué, retraçant l’histoire de cette coopération bilatérale. Il a évoqué, avec une sincérité touchante, les hauts et les bas qui ont jalonné cette relation, en soulignant l’importance du dialogue constant entre les deux pays. “Malgré les aléas de l’histoire,” a-t-il déclaré, “la France et la Chine ont toujours su se retrouver autour de valeurs universelles et d’un respect mutuel.” 

     

    Le premier prix de l’Ambassadeur : douze personnalités à l’honneur 

    Pour la première fois, l’ambassade de Chine a décerné le Prix de l’Ambassadeur, récompensant douze personnalités françaises ayant contribué, dans des domaines variés, à renforcer les relations franco-chinoises. Les lauréats, issus d’horizons aussi divers que la culture, la diplomatie, les affaires ou l’éducation, incarnent la richesse de cette amitié. 

    • Alain Caporossi : ses travaux sur la culture chinoise ont enrichi la compréhension mutuelle entre les deux pays.
    • Victor Abbou : figure de la communauté sourde en France, il a favorisé des échanges dans le domaine de l’accessibilité.
    • Jacques Saint-Marc : acteur clé du développement de partenariats économiques franco-chinois.
    • Jean Pégouret : spécialiste en géopolitique, notamment de la Chine et de la Russie, il a contribué à une meilleure compréhension des dynamiques internationales.
    • Grégoire de Gaulle : photographe, il a capturé des images reflétant les liens culturels entre la France et la Chine.
    • Christine Cayol : fondatrice de Yishu 8 à Beijing, elle a créé un pont culturel entre artistes chinois et français.
    • Alain Labat : promoteur infatigable de la gastronomie française en Chine, il a contribué à la diffusion de la culture culinaire française.
    • Daniel Vial : il a joué un rôle déterminant dans la préservation du patrimoine culturel, notamment en initiant des efforts pour la sauvegarde de la Grande Muraille de Chine. 
    • Joël Bellassen : figure incontournable de l’enseignement de la langue chinoise en France, il a renforcé les échanges éducatifs.
    • Mireille Mathieu : icône de la chanson française, elle a conquis le cœur du public chinois.
    • Jacques Caen : ses travaux architecturaux mêlent influences françaises et chinoises, symbolisant l’harmonie entre les deux cultures.
    • Hélène Mrachiso : centenaire française, elle a, avec son mari, construit dès les débuts des relations diplomatiques, des ponts amicaux avec la Chine.

     

    L’importance de la diplomatie 

    Ces personnalités, par leur engagement, ont donné un visage humain et tangible à cette relation diplomatique. Elles montrent comment la culture, la science, l’éducation et l’art peuvent transcender les barrières culturelles, incarnant l’idée que « la vraie sagesse est de reconnaître l’unité dans la diversité », comme l’a écrit Confucius dans ses Entretiens. 

    Cette célébration a également rappelé le rôle essentiel des diplomates comme passeurs de cultures et de valeurs. Leur travail, souvent invisible, trouve écho dans la pensée de Paul Valéry, qui disait : « Le but de la vie humaine est de façonner l’âme, et rien ne la façonne davantage que l’échange avec l’autre. » Ces mots prennent tout leur sens dans un contexte où chaque geste diplomatique, à l’instar de la poésie, exige patience, profondeur et sensibilité. 

    Au-delà des chiffres et des traités, les relations franco-chinoises sont portées par des femmes et des hommes qui, à l’image des douze lauréats, œuvrent chaque jour à renforcer les liens entre les deux nations. Ces bâtisseurs, véritables artisans du rapprochement, incarnent la force discrète mais essentielle de la diplomatie humaine, là où l’intellect, le cœur et la main se rejoignent. 

     

    Un futur à bâtir ensemble 

    Cette soirée, empreinte d’émotion, a offert une vision optimiste de l’avenir, tout en rappelant les défis posés par le contexte international. Dans un monde marqué par des tensions croissantes, France et Chine réaffirment l’importance de leur coopération pour relever des enjeux globaux tels que le changement climatique, la sécurité alimentaire ou encore la préservation de la paix. Ces défis transcendent les frontières et appellent à un dialogue constant, basé sur la compréhension et le respect mutuel. 

    Depuis son arrivée en France, l’ambassadeur Lu Shaye a su porter une vision pragmatique et réaliste de la Chine dans un paysage médiatique français parfois hostile. À travers des interventions mesurées mais fermes, il a rappelé les nuances de la politique chinoise et les priorités d’un pays complexe et souvent mal compris en Occident. 

    Lu Shaye a incarné la figure d’un diplomate à la fois ancré dans la tradition et tourné vers l’avenir, reflétant les propos de Laozi : « Un voyage de mille lieues commence par un pas. » Ce pas, il l’a fait avec une détermination empreinte de respect, cherchant à déconstruire les préjugés et à ouvrir des voies d’échange entre les deux nations. Il a notamment insisté sur la nécessité d’un dialogue sincère, soulignant que la compréhension mutuelle ne peut s’établir que sur la base de faits et de perspectives équilibrées. 

    Son action a aussi mis en lumière le rôle crucial de la diplomatie culturelle. En s’appuyant sur des initiatives concrètes, comme cette remise du Prix de l’Ambassadeur, il a rappelé que les liens humains, tissés au fil des décennies, sont au cœur de la relation franco-chinoise. Dans cet esprit, les mots de Zhuangzi résonnent avec force : « Celui qui suit la Voie regarde toutes choses avec égalité. » Ce regard égalitaire est essentiel pour bâtir un futur commun, où chaque culture peut apporter sa richesse sans domination. 

    En célébrant le passé, cette soirée a aussi jeté les bases d’un avenir partagé. L’amitié franco-chinoise, nourrie par l’histoire et les actions de personnalités engagées, continuera de rayonner. Les défis restent nombreux, mais ils sont autant d’opportunités pour réaffirmer que la coopération, la patience et la volonté d’apprendre l’un de l’autre sont les véritables clés du progrès. 

    À travers cette soirée, un message clair a été adressé : le futur des relations entre la France et la Chine dépendra non seulement des gouvernements, mais aussi des individus, de leurs idées, et de leur capacité à bâtir des ponts, à l’image des douze lauréats honorés. Ce futur, à construire ensemble, incarne la continuité de cette riche tradition d’échange, illustrant encore les sages paroles de Confucius : « Lorsque les relations humaines sont en harmonie, toutes les voies deviennent possibles. »