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Lecture(s)

  • Francis Denis, "Gel" : quand l’humanité gèle, que reste-t-il ?

    Francis Denis, Gel, littérature, récit, confinement, humanité, covid19, politique, rêveLe froid. L’immobilité. L’isolement. Avec Gel, Francis Denis nous emmène aux confins de l’effondrement, là où les confinements successifs ne sont plus seulement une réponse sanitaire, mais un processus inexorable de dissolution du réel. Ce livre n’est pas seulement un récit de fin du monde, c’est une autopsie de notre époque, une plongée dans ce que l’humanité pourrait devenir lorsqu’elle se fige, enfermée dans ses propres illusions.

    Un texte éclaté, une réalité fragmentée

    Dans Gel, tout commence comme un enchaînement de scènes de confinement. Nous sommes projetés dans des dialogues absurdes, des monologues mélancoliques, des suppliques d’enfants, des récits de solitude et de dérive. L’écriture est multiple, changeante, comme si elle tentait de saisir un monde qui s’effrite. Mais bientôt, le froid s’installe. Un froid métaphysique, un gel intérieur autant qu’extérieur.

    Le texte mute. Ce qui était une succession de vignettes d’enfermement se transforme en une épopée post-apocalyptique, un monde où les survivants tentent d’échapper à la glaçure, où les corps métalliques remplacent les corps humains, où la résistance se fait dans l’errance. Le réel n’est plus qu’une distorsion. L’avenir est un mirage.

    Confinement, aliénation et domination technologique

    Denis n’écrit pas pour consoler. Il n’écrit pas pour raconter la crise du Covid comme un trauma à surmonter. Il écrit pour disséquer un monde malade de ses propres contradictions, un monde où la technologie et la peur finissent par remplacer le libre arbitre. Dans cette fresque froide et clinique, ce sont les mêmes questions qui hantent chaque page : jusqu’où peut-on aller pour survivre ? Quelle part d’humain reste-t-il en nous quand tout s’effondre ? Sommes-nous encore capables d’imaginer une autre voie que l’obéissance et la résignation ?

    Les corps s’atrophient sous les masques, la mémoire se dissout sous l’urgence, et les survivants deviennent des silhouettes errantes, prises au piège d’un ordre invisible, un ordre où l’individu n’est plus qu’une donnée parmi d’autres, à décontaminer, à surveiller, à effacer.

    Une claque littéraire, une insurrection silencieuse

    Dans Gel, il ne s’agit pas seulement de raconter la catastrophe. Il s’agit de la penser, de la ressentir sous la peau, de la voir s’infiltrer dans les pores de nos sociétés, dans nos esprits conditionnés. Ce livre est un cri sous la glace, une insurrection silencieuse contre l’effacement progressif de ce qui nous rend vivants.

    Francis Denis ne cherche pas à plaire. Il dérange. Il questionne. Et surtout, il invite à regarder en face la vérité la plus crue : l’effondrement n’est peut-être pas devant nous. Il a déjà commencé.

  • Le Cri de la Perse : un hymne à la liberté des femmes

    Tahoura Tabatabaï-Vergnet, cri, femmes, exil, Perse, Iran, liberté, poésie, indépendance, rêve, amourSur le blog Rebelle, où l'on explore les pensées éclairées et les combats universels, Tahoura Tabatabaï-Vergnet nous offre, avec Le Cri de la Perse, une œuvre poignante qui fait vibrer l'âme humaine. Ce recueil n’est pas simplement une ode à la Perse ; il est le souffle brûlant d’un combat éternel pour la liberté, celui des femmes, des opprimés, des sans-voix.

    La poésie comme flamme

    Chaque poème de ce recueil s’élève comme une incantation, un appel à la lumière. Loin d’être un simple témoignage de l’exil et de la nostalgie, Le Cri de la Perse est une révolte. Les mots, choisis avec une précision presque douloureuse, rappellent que la poésie est l’un des derniers refuges face à l’injustice.

    Dans La Lionne de Perse, Tabatabaï-Vergnet dépeint une femme libre, farouche, portant dans sa crinière et ses gestes toute l’essence d’une nation en quête de renaissance. Cette lionne, figure centrale du recueil, incarne les femmes iraniennes qui, en dévoilant leurs cheveux et en levant la voix, défient des siècles de répression.

    Un cri qui traverse les âges

    À travers les pages, l’autrice relie l’Histoire à l’actualité, les traditions persanes aux luttes modernes. Dans Je suis la fille de Cyrus le Grand, elle revendique l’héritage d’une culture riche, forte, mais enchaînée. La voix de Tabatabaï-Vergnet transcende les siècles pour rappeler que les femmes ont toujours été au cœur des batailles pour la justice.

    Et pourtant, ce cri ne s’éteint jamais. Il fait écho aux luttes contemporaines : celles des femmes qui, en Iran ou ailleurs, osent revendiquer leur droit à exister pleinement, librement. Les vers dénoncent, tout en proposant une utopie fragile, celle d’un avenir où les femmes et les hommes construiraient ensemble, sur les ruines de l’oppression, un monde où la culture et l’éducation triompheraient de la violence.

    La liberté à conquérir, encore et toujours

    Dans Le voile de l’oubli, le lecteur est confronté à une question universelle : combien de fois l’Histoire devra-t-elle être réécrite pour qu’on se souvienne enfin de la place des femmes ? Les âmes brisées, les vies sacrifiées, les corps silencieux n’ont jamais cessé de crier, et Tahoura Tabatabaï-Vergnet amplifie leur voix.

    Dans ses vers, la liberté des femmes n’est pas une revendication abstraite : elle est une nécessité existentielle. La poésie devient un acte militant. Elle ne parle pas seulement des femmes iraniennes, mais de toutes les femmes muselées par les systèmes patriarcaux, les traditions et les idéologies.

    Crier, toujours plus fort

    Le Cri de la Perse nous rappelle une vérité amère : la liberté ne se donne pas, elle se conquiert. Et les femmes, comme des lionnes, doivent parfois rugir pour briser les chaînes. Mais ce cri, loin d’être une lamentation, est une force. Il résonne comme un appel à l’action, un encouragement à ne jamais détourner les yeux.

    Ce recueil, en s’ancrant dans une histoire singulière, ouvre des perspectives universelles. Il incite chaque lecteur à se poser une question fondamentale : qu’est-ce que la liberté, et qu’êtes-vous prêt à faire pour elle ?

    Tahoura Tabatabaï-Vergnet ne crie pas seule. En lisant ses poèmes, nous devenons complices de son chant, porteurs de son message. Ce cri, loin de s’éteindre, continue de résonner dans le cœur de ceux qui l’entendent. Il nous appartient de le porter, toujours plus fort.

    À lire, à partager, et surtout, à continuer de faire résonner.

  • Et si on posait un regard scientifique sur le yoga ?

    Yoga, Najat Zahid-Méaulle, Route de la Soie - éditions, livre, inspirationSur le blog Rebelle, on aime les esprits audacieux, ceux qui osent bousculer les idées reçues. Avec Yoga Inspiré : Une vision scientifique, Najat Zahid-Méaulle nous livre une œuvre qui allie réflexion scientifique, sagesse philosophique, et exploration poétique du corps humain. Ce livre publié par La Route de la Soie - Éditions, superbement illustré par Patrick Bonjour, est bien plus qu’un guide de yoga : c’est une invitation à redécouvrir la relation entre le corps et l’esprit à travers une approche éclairée et accessible.

    Un yoga enraciné dans la science

    Dès l’introduction, l’autrice, biologiste de formation et yogiste expérimentée, pose les bases : le yoga mérite d’être exploré non pas seulement comme une pratique millénaire, mais comme une discipline dont les bienfaits peuvent être expliqués et renforcés par des faits scientifiques. À travers des notions d’anatomie, de physiologie, et même de biochimie, elle nous guide pour mieux comprendre les interactions entre les postures (asanas) et nos systèmes internes : respiratoire, circulatoire, digestif, nerveux, et bien d’autres.

    Chaque chapitre est un voyage captivant. Vous apprendrez, par exemple, comment une simple respiration diaphragmatique peut apaiser l’esprit, stimuler la digestion et même activer le système parasympathique pour réduire le stress. Zahid-Méaulle tisse habilement science et philosophie, citant Sénèque et Rabelais tout en expliquant des concepts tels que la variabilité cardiaque ou l’équilibre énergétique des chakras.

    Une pédagogie qui respire

    Loin des manuels austères, Yoga Inspiré se démarque par son ton accessible et ses illustrations vivantes. Les postures, décrites avec clarté et accompagnées d’explications sur leurs impacts physiologiques, deviennent une source d’inspiration pour les novices et les yogistes confirmés. Plutôt que de s’attarder sur les performances techniques, l’autrice privilégie une approche respectueuse du corps, soulignant l’importance de la douceur et de la conscience dans chaque mouvement.

    Un appel à la transformation

    Le livre ne se contente pas d’être un guide pratique. C’est un manifeste pour une vie harmonieuse, où le yoga est présenté comme l’un des cinq piliers essentiels, aux côtés de la méditation, de l’alimentation, du sommeil, et de la marche. Cette vision holistique, à la fois ancrée dans la tradition et éclairée par la science moderne, est une bouffée d’air frais dans un monde où la quête de bien-être est souvent réduite à des recettes superficielles.

    Pourquoi lire ce livre ?

    Si vous êtes en quête d’une pratique qui allie corps et esprit, si vous voulez comprendre pourquoi certaines postures vous apaisent ou vous revitalisent, Yoga Inspiré est fait pour vous. Plus qu’un livre, c’est un compagnon pour ceux qui veulent explorer leur humanité en profondeur, tout en respectant les merveilles et les mystères du corps humain.

  • La musicalité des mots : un voyage avec Métamorphose(s) de Zhao Lihong

    Zhao Lihong, livre, lecture, poésie, art, littérature chinoiseMétamorphose(s), le dernier recueil de poésie de Zhao Lihong, que j’ai eu le privilège de traduire cet été, est bien plus qu’un simple ouvrage littéraire. C’est une ode à la beauté du cœur humain, un souffle vibrant qui rythme chaque page, une immersion dans une humanité qui embrasse pleinement sa sensibilité. Ce qui évidemment me plait car c'est à l'envers de notre époque consumériste.

    La poésie de Zhao Lihong est comme une mélodie douce, parfois tourmentée, mais toujours empreinte d’un profond respect pour les émotions humaines. Chaque mot résonne comme une note de musique, chaque vers s’enlace au suivant dans une harmonie délicate. En traduisant ces poèmes, j’ai ressenti leur rythme, leur souffle, comme une pulsation vivante qui me guidait à travers le texte.

    Cette pulsation, ce souffle, n’est pas sans évoquer le concept chinois du Qi — cette énergie vitale qui traverse et relie toutes choses. Dans les poèmes de Zhao Lihong, le Qi semble infuser chaque image et chaque métaphore, créant un flux harmonieux entre les éléments naturels, les émotions humaines et les réflexions philosophiques. Les descriptions poétiques, comme celles de Synesthésie, témoignent d’une profonde connexion entre le visible et l’invisible, entre le tangible et l’intangible : “Chaque silence a une voix / Chaque voix est silencieusement muette.”

    La capacité de Zhao Lihong à rendre palpable cet équilibre subtil évoque également le principe de wu-wei dans la philosophie taoïste : l’idée d’agir sans effort, de suivre le courant naturel des choses. Ses poèmes ne cherchent pas à imposer une signification mais à révéler une harmonie préexistante, à laisser le lecteur trouver son propre chemin à travers les images et les sons. Le poème Métamorphoses illustre particulièrement bien cet état d’acceptation fluide des transformations naturelles : “Transforme-moi en une fleur / Épanouie et belle / Mais ne vivant qu’un jour.”

    Ces lignes ne traduisent pas seulement une réflexion sur l’éphémère, mais aussi une invitation à accueillir le changement avec grâce, à devenir partie prenante du grand mouvement cosmique. Ce lâcher-prise poétique est un écho direct à la philosophie du wu-wei, où le plus grand accomplissement réside souvent dans le fait de s’effacer pour laisser la vie suivre son cours.

    La thématique de la transformation, centrale dans Métamorphose(s), est un fil conducteur qui traverse l’ensemble du recueil. Elle nous invite à voir au-delà des apparences et à accepter les métamorphoses naturelles de la vie. Qu’il s’agisse de devenir une “route droite menant à l’infini” ou une “sculpture figée dans une paroi rocheuse antique”, les métaphores de Zhao Lihong traduisent une recherche d’harmonie entre l’éphémère et l’éternel, entre la douceur et la dureté.

    Enfin, ce recueil nous offre une profonde leçon d’humanité. Dans un monde souvent marqué par l’indifférence, Zhao Lihong rappelle la puissance de l’amour, même dans ses formes les plus modestes. Le poème Aimer chaque personne nous interpelle sur nos liens avec les autres, qu’ils soient marqués par la gratitude ou la difficulté. C’est un appel à embrasser notre vulnérabilité et à voir dans nos blessures le potentiel de la beauté et de la rédemption.

    Traduire Métamorphose(s) a été une expérience aussi exigeante qu’enrichissante. Il ne s’agissait pas seulement de rendre des mots dans une autre langue, mais de retranscrire une musique, une émotion, un souffle — ce Qi littéraire qui traverse chaque vers. Ce recueil est une invitation à ralentir, à écouter, à sentir, et à laisser le cœur s’épanouir.

    En lisant Métamorphose(s), nous sommes conduits à retrouver un équilibre perdu, à résonner avec l’harmonie du monde, et à percevoir, dans le silence, la puissance d’un souffle invisible. Une œuvre qui résonnera en vous bien après la dernière page, comme une mélodie persistante dans le silence.