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  • Livres Femmes : tenir la lumière, année après année

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    Chaque année, lorsque revient le Salon Livres Femmes, je mesure un peu plus la force silencieuse de cet événement. Voilà maintenant sept ans que j’ai la responsabilité d’en assurer l’organisation. Sept années de rencontres, de lectures, de visages, de voix, de récits qui, mis bout à bout, finissent par former une évidence : ce salon ne doit jamais disparaître.

    Il existe depuis plus de trente-cinq ans, créé par l’AFFDU dans un geste à la fois simple et visionnaire : offrir aux femmes qui écrivent un espace où leur parole ne serait ni filtrée ni marginalisée.
    Un lieu où la visibilité n’est pas un privilège, mais un droit culturel fondamental.

    Ce que l’on apprend en tenant une lumière

    Organiser un salon comme celui-ci, ce n’est pas seulement gérer une logistique.
    C’est se tenir, soir après soir, dans cette conviction tranquille : les femmes ne sont pas un addendum de la littérature. Elles en sont la substance.

    Au fil de ces sept années, j’ai vu ce salon résister à des vents contraires, traverser des périodes d’incertitude, et, pourtant se dresser à chaque édition comme une lanterne patiente au cœur de Paris. J’ai compris, à mesure que défilaient les autrices et les lecteurs, que Livres Femmes n’a jamais été un salon parmi d’autres.
    C’est un lieu de réparation, un lieu de mémoire, un lieu de passage.

    L’invisibilisation : ce phénomène qui se glisse là où on ne l’attend plus

    On pourrait croire l’invisibilisation dépassée. Les femmes publient, enseignent, s’expriment. Les vitrines des librairies s’ouvrent, timidement. Les discours officiels se parent de grands principes.

    Mais lorsqu’on se tient réellement au contact des œuvres, lorsqu’on écoute les autrices raconter leur parcours, lorsqu’on observe qui reçoit les prix, qui est invité aux tribunes prestigieuses, qui est cité comme référence… alors le tableau se nuance.

    Il y a encore de l’ombre. Et cette ombre n’est pas spectaculaire. Elle n’est pas violente. Elle est silencieuse. Une omission douce, un effacement discret. Elle agit comme un voile posé sur des vies pourtant essentielles. Le Salon Livres Femmes existe précisément pour lever ce voile.

    Un salon ouvert : les hommes y entrent sans frapper

    Cette année encore, comme chaque année depuis plus de trois décennies, le salon accueillera aussi des hommes. Non pas parce qu’il faudrait « équilibrer », mais parce que la compréhension des femmes, celles qui font l’histoire, celles que l’histoire oublie, n’est pas l’affaire d’un seul genre.

    Les hommes sont les bienvenus lorsqu’ils écrivent sur les femmes, non pas pour parler à leur place, mais pour contribuer à réparer la mémoire collective.

    Cette ouverture fait partie de la philosophie du salon : la lumière n’éclaire vraiment que si elle circule.

    Sept années pour comprendre que ce salon est un acte

    En prenant la charge de son organisation, je pensais initialement transmettre, coordonner, soutenir. Mais très vite, j’ai compris autre chose : organiser Livres Femmes, c’est résister.

    Résister à l’oubli. Résister à l’indifférence. Résister aux modes qui passent. Résister à la vitesse qui dévore tout, y compris la mémoire des voix essentielles. À chaque édition, je vois les autrices trouver ici un espace où leur parole retrouve son poids spécifique, sa densité initiale, débarrassée des filtres et des attentes normatives qui l’affaiblissent ailleurs.

    Livres Femmes, un lieu où la littérature reprend souffle

    Lorsque la mairie du 6ᵉ ouvrira ses portes le 29 novembre, ce ne sera pas seulement pour accueillir un salon littéraire. Ce sera pour accueillir un passage de lumière, un espace où la littérature retrouve ses raisons d’être : transmettre, éclairer, relier, émanciper.

    Je sais aujourd’hui que Livres Femmes est indispensable.
    Je le sais parce que je l’ai vu battre, respirer, vibrer, survivre.
    Je le sais parce que chaque année les autrices me disent combien cet espace compte.
    Je le sais parce que les lecteurs y trouvent ce qu’on ne trouve plus ailleurs : un rapport authentique au texte et à l’humanité.

    Tenir la lumière

    Organiser ce salon depuis sept ans m’a appris que certaines institutions ne tiennent pas parce qu’on les renforce, mais parce qu’on les incarne.
    Parce que des femmes et des hommes aussi, décident que cette lumière-là doit continuer.

    Le Salon Livres Femmes n’est pas une manifestation culturelle. C’est un engagement dans le temps long. Un lieu où l’on refuse l’effacement. Un lieu où l’on réinvente, ensemble, la possibilité d’une culture juste.

    Et tant que nous serons nombreuses et nombreux à le porter, la lumière ne faiblira pas.

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  • Rabbit Hole

    0x1200x17698-or.jpgNous sommes vendredi 18 janvier 2019. Le froid bat les pavés parisiens. Les discours volent en tous les sens, comme autant de commentaires infinis sur le désordre social. Tout ceci rime dans mon esprit avec l'absence de réflexion, de mise en perspectives (un effondrement d'un système ne signifie pas la fin de tout, mais bien la nécessaire mise en commun de nos réflexions pour en élaborer un autre - cf. Traces de révoltes). Serions-nous en dissonance cognitive collective ? 

    Pourquoi cette introduction me direz-vous ? Parce que nous sommes des corps situés. Le contexte d'une rencontre, d'une découverte importe donc pour comprendre ce qui é-meut. Rendez-vous donc au Théâtre des Bouffes Parisiens pour découvrir la pièce Rabbit Hole.

    Il fait froid, il fait nuit, la journée a été longue de ces contradictions permanentes, et je ne vous cache pas mon a priori énorme à voir une pièce qui nécessairement allait me faire remonter des souvenirs.

    Lorsque j'ai lu le résumé de la pièce, mon envie de faire demi-tour était grande : "Une création tout en nuances et en émotions. Comment des parents peuvent-ils se remettre de la perte d'un enfant...? Loin des facilités du pathos, cette histoire nous plonge dans le quotidien d'une famille tentant de se reconstruire. Un quotidien sensible, lucide, souvent drôle, même, qui transcende les petites choses de l'ordinaire pour faire vibrer la profondeur de l'humain." 

     

    Disparaître ou continuer à aimer ?

    Quel est donc cet endroit où nous pourrions nous cacher ? Cacher notre douleur de cet amour impossible à se détacher de nous-même ? Sans doute est-ce là l'enjeu du "Rabbit Hole", ce trou de lapin où nous aimerions tous nous cacher quand rien peut aller à la suite de la perte tragique d'un enfant (ou d'un proche). David Lindsay-Abaire, l'auteur américain de cette pièce a sans doute eu cela en tête lorsqu'il a décidé d'écrire avec force et sincérité l'histoire de ce couple huit mois après la disparition de leur fils. 

    C'est  donc l’histoire de Becky (Julie Gayet) et Howard (Patrick Catalifo), qui tentent, chacun à leur manière de faire face à la mort de leur enfant de quatre ans, fauché par une voiture alors qu'il courait après son chien. L'univers bascule, les souvenirs envahissent le présent, la perte occupe l'espace de cette maison. L'onde de choc parcourt le plateau. Comment revenir à la vie ? Comment aimer à nouveau ? Le couple est entouré ici de Izzy (Lolita Chammah), la sœur de Becky qui tombe enceinte et ne sait pas comment l'annoncer à sa soeur et Nat (Christiane Cohendy), leur mère. 

     

    Dire avec le tranchant de l'humour

    Comment faire disparaître cette boule (de douleur) au fond de soi qui empêche d'avancer ?  David Lindsay-Abaire se joue des mots, du quotidien. Tout se révèle au fur et à mesure de la pièce. Les situations, les gestes, les phrases rien ne doit dépasser, rien ne doit provoquer le chagrin, la douleur des parents. 

    Là où je m'attendais à du pathologique, du drame en noir : surprise ! L'humour implacable de la langue et des absurdités du quotidien sont mises en avant. À chaque instant, jaillit un trait d'humour. Quand Becky parle de la crème caramel, quand Izzy raconte son altercation en boîte de nuit, ou quand Nat évoque le bruit autour des jouets offerts... L'humour noir entre Becky et Howard. L'humour tragique jaillit aussi au moment où les personnages perdent le contrôle, ne voyant plus leur maladresse (je pense ici où Nat évoque avec insistance la malédiction du clan Kennedy). 

    Il y aussi le renversement de nos biais cognitifs, nous pensons immédiatement que Howard semble plus armé pour survivre au drame et renouer avec une vie "normale"... Mais une fois au coeur de leur quotidien on s'aperçoit que la situation est plus complexe. Les douleurs respectives du couple mais également de leurs proches résonnent en écho. Comment s'en sortir ? Comment vivre après la perte ? "Rien ne sera plus comme avant" alors à quoi bon chercher ? 

    Ce fragment de vie passé au microscope, nous fait voir une chose remarquable: la vie en elle-même. Vivre c'est s'accrocher, se raccrocher, c'est un déséquilibre. Vivre, c'est faire résonner nos écorchures plus ou moins profondes. Sans cesse, sur le fil de l'humour. Il ne faut pas vous tromper en lisant le résumé de cette pièce, le fil conducteur n'est pas le pathologique mais l'amour (et son liant universel l'humour). 

     

     

    Des acteurs remarquables 

    Comment entrer dans ces rôle complexes sans y laisser des plumes ? Comment faire la part des choses entre les douleurs des personnages et ses propres douleurs ?

    Je dois avouer ici que j'ai complètement découvert Julie Gayet. Une révélation en mère forte et fragile. Elle incarne Becky. Elle veut dire sa douleur de mère tout en cherchant à faire sans son fils. En violences contenues, en mots jetés, rattrapés, en gestes pour dire sans dire. Je l'ai trouvée renversante de sincérité.  

    Face à elle, Patrick Catalifo incarne Howard (son mari). Une présence scénique puissante et fragile. On le voit comme mari, mais il est le père. Et c'est dans ce renversement permanent du père qui veut dire sa douleur et du mari qui veut aider sa femme à s'en sortir que Patrick Catalifo prend une dimension magnifique. 

    Lolita Chammah incarne Izzy (la soeur) de façon à la fois sublime et fantasque. Une énergie à toute épreuve, un humour incisif, une belle et attachante présence. 

    Renan Prévot qui incarne le jeune conducteur joue à la perfection sa présence fragile, perdue, déboussolée, déboussolante. 

    Christiane Cohendy (Nat) en mère de Becky est totalement bouleversante de justesse. Elle une palpitation. Elle qui doit ou devrait consoler sa fille, tout en soutenant la grossesse de son autre fille, tout en pleurant la perte de son petit fils, tout en revivant la mort de son fils. Il y a chez Christiane Cohendy une magnifique facilité à être ce personnage. Elle lui donne corps, faisant régner la mélodie des fractales temporelles.

     

    Comment conclure ?

    Maison ouverte, mouvante. Claudia Stavisky et le scénographe Alexandre de Dardel ont mis en écho les souvenirs par des jeux d'espace qui se plient, se replient, se déplient. Où l'humour transcende la douleur, où les pas des uns font danser les souvenirs des autres. Ainsi portée et orchestrée, Rabbit Hole est une pièce qui donne envie de retrouver sa joie de vivre, son humanité. Une bouffée d'air frais. Une véritable leçon d'amour.

     

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    Mise en scène : Claudia Stavisky 

    Adaptation : Marc Lesage

    Distribution : Julie Gayet, Patrick Catalifo, Lolita Chammah, Christiane Cohendy, Renan Prévot

    Informations & Réservations : Guichet - 4, rue Monsigny,  75002   Paris

    Tél. location : 01.42.96.92.42 / 01.42.96.92.44 Fax location : 01.42.86.88.73

     

     

     

     

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    Gilet jaune, manifestation, paris

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