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Rebelle - Page 34

  • La fin de nos libertés

    “Le premier des droits de l'homme c'est la liberté individuelle, la liberté de la propriété, la liberté de la pensée, la liberté du travail.”

    Jean Jaurès

     

     

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    Entre la phrase de Jean Jaurès et ce livre de Jean-Hervé Lorenzi & Mickaël Berrebi, quelque chose s'est perdu en chemin. C'est étonnant, non ?

    Mais quoi me direz-vous ? Le mythe de notre liberté, de notre indépendance ? Ce livre comme l'indique sa quatrième de couverture est "un plaidoyer pour le progrès. Il nous fait pénétrer dans l'univers des nouvelles technologies, ses exceptionnelles perspectives et ses risques.

    On évoque aujourd'hui beaucoup le numérique, à juste titre, mais bien d'autres domaines scientifiques sont concernés, la génétique, l'énergie, les nano-technologies. Peut-être notre liberté est-elle en danger : les dirigeants de ces grandes entreprises technologiques veulent définir le monde dans lequel nous vivrons dans les décennies à venir.

    Il s'agit donc d'éviter que les entreprises imposent leurs choix au monde, au détriment des puissances publiques, dans tous les domaines de notre vie sociale et privée.

    Une première question parmi bien d'autres émerge : faut-il démanteler Google et les autres GAFA ?"

    Mais il est aussi une enquête dans l'envers du décor. Le décor c'est notre paysage quotidien : les yeux rivés sur les smartphones, les pouces joueurs, les casques sur les oreilles (ou nouvelle mode l'enceinte portable)... Une société atomisée, divisée déjà évoquée de multiples fois dans mes articles ou dans mon essai "Nouvelles technologies - Nouveaux publics".

    Mais reprenons, dès l'introduction les auteurs, cite Raymond Kurzweil (vous savez le futurologue du MIT - le maître de Google) "sa liste de prédictions est longue elle s'étend jusqu'en 2099. Il décrit les différentes phases qui vont conduire l'homme vers un nouveau genre, celui de l'homme "augmenté", mi-homme, mi-robot" (Cf. page 17). Cela fait un moment que nous le savons, que nous essayons d'éveiller les consciences vis-à-vis de leur addiction technologique qui peut aller jusqu'à son ingestion. Bref, l'humain doit s'habituer à ses nouveaux comportements, les siens... Je me souviens encore des premiers "kit oreillette" dans les bus, où nous pouvions encore croiser le regard d'un autre humain sans craindre de déclencher une guerre. Celui qui avait l'oreillette et qui avait une conversation, passait pour un fou (de raconter sa vie ainsi)... C'était il y a sans doute un peu plus de quinze ans maintenant, aujourd'hui la vie s'étale en réseaux... 

    L'observation de ces comportements est un indicateur de ce qu'il se produit réellement dans l'envers du décor. Qui décide ? Qui dicte ces nouveaux modes de fonctionnement ? Quelque chose de fou se produit sous nos yeux et pourtant personne ne semble bouger. Nous sommes quelques fous à crier, à faire prendre conscience. Nous tentons de faire bouger les lignes face à une génération fataliste qui ne cherche pas à sortir de ce conformisme imposé. 

    Ce livre arrive au bon timing. Il évoque dans le passage à l'intelligence artificielle, le lien entre déshumanisation et asservissement volontaire. Cette déshumanisation "suppose un processus où l'homme se voit retirer, ce qui est force de droit dans les sociétés modernes, sa dignité d'être humain" (cf. p.53). 

    Il ne s'agit pas d'arrêter le progrès, mais il s'agit de l'encadrer, de lui proposer un système épanouissant pour tous, pas seulement pour certains privilégiés (soit les 1% des jobs)... Sur ce point, il aurait été intéressant de s'attarder sur les villes dites du futur (comme Google, Apple, Facebook, etc.)... villes dont les internautes sont exclus. C'est un paradoxe des plus frappants. 

    Mais le plus alarmant, c'est que cela indique clairement que nous (les citoyens) mais aussi les pouvoirs publics ne décident de rien face à ces géants capables de faire bouger les lois, les règles comme ils l'entendent. "Les grandes sociétés technologiques, qu'elles soient numériques, de génie génétique, de l'énergie ou du transport spatial, ont rapidement compris cette situation, cette vacuité publique et ont décidé de décrire l'avenir, leur avenir et désormais le nôtre, dessinant ainsi une société telle qu'elles la voyaient" (Cf. p. 159). Il est urgent que les institutions publiques reprennent les cartes en mains, en posant les véritables questions, sinon les citoyens devront entrer en résistance. 

     

    Un livre à lire, relire qui devrait éveiller les consciences de ceux (même des nouvelles générations) qui sentent que leurs quêtes personnelles est ailleurs : dans la réalisation d'eux-mêmes....

     

    _______

    L'avenir de notre liberté Faut-il démanteler Google... Et quelques autres ?

    Ed. Eyrolles.

     

  • L'égalité en panne

    Des réclamations collectives ont été déposées contre les quinze États Membres du Conseil de l’Europe qui les acceptent par le Groupe Européen des Femmes Diplômées des Universités, GEFDU / University Women of Europe, UWE, à l’initiative d'Anne Nègre, avocate au barreau de Versailles, France , pour violation de la Charte Sociale Européenne en matière de salaire égal pour un travail égal entre les femmes et les hommes. C’est une première historique !

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    Ni la France, ni l'Allemagne ni les autres ne respectent les lois en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes. La justice européenne a été saisie, mais bizarrement rien n'avance.

    Pour faire le point sur ce sujet, j'ai souhaité donner la parole à Anne Nègre afin qu'elle nous explique les enjeux de ces réclamations passées sous silence. 

    Vous avez passé 2 ans à monter ces réclamations collectives pour violation de la Charte Sociale, Pourquoi ? Quel est le but ?

    Anne Nègre : La Charte Sociale Européenne est en quelque sorte la Constitution Sociale de l’Europe, la Grande Europe celle du Conseil de l’Europe, car c’est un Traité du Conseil de l’Europe, de 1961. Depuis 1995 ces réclamations collectives sont aussi ouvertes à des organisations internationales non gouvernementales habilitées par le Conseil de l’Europe et 15 Etats Membres les acceptent, ils sont également des Etats Membres de l’Union Européenne. Il est clair qu’aucun pays en Europe ne respecte le salaire égal pour un travail égal entre les femmes et les hommes, ce faisant ils violent les dispositions de la Charte Sociale Européenne. Il s’avère qu’aucune réclamation collective n’avait, à ce jour, été déposée contre cette violation particulièrement grave et injuste qui touche toutes les femmes qui travaillent, quelque que soit leur niveau de qualification. L'une des premières conséquences, c'est que les femmes travaillent gratuitement en moyenne 2,5 mois par an. 

    Pensez-vous que l'égalité puisse arriver ? Est-ce là votre conviction ?  

    Anne Nègre : Oui si les citoyennes et les citoyens se mobilisent. Ce problème de l'égalité des saalires est crucial. Il doit être traité comme il se doit par les politiques, en mettant en place des structures juridiques et de contrôle efficaces. L'égalité est faisable si les preuves sont accessibles, si les juridictions saisies réagissent dans le bon sens, si les entreprises respectent les lois.

    Quels sont les états incriminés ? Pouvez-vous citer un ou deux exemples concrets ? 

    Anne Nègre : Les états vous avez la France, l'Allemagne, la Belgique, le Portugal, la Bulgarie, etc. Après, prenons l'exemple d'une femme qui travaille depuis 20 ans dans une entreprise. Elle constate que les hommes, engagés en même temps qu’elle, ont tous eu des promotions (ils ont des responsabilités reconnues) et donc des salaires correspondants. Dans les faits il ont fait la même chose. Ils ont le même job, mais on contourne l’égalité salariale en donnant des primes particulières uniquement aux hommes, justifiés par des horaires un peu différent. 

    Pensez-vous que les états vont vous laisser faire ?

    Anne Nègre : Non. Dans le cadre de ces 15 procédures, les états se sont concertés pour contester la recevabilité de Université Women of Europe (GEFDU/UWE) l'association avec laquelle j'ai déposé ses réclamations. Cette fédération regroupe des associations de femmes de divers pays européens qui pour certaines ont près de 100 ans. Elles ont toutes été à la pointe de tous les combats des droits des femmes. Toutes sont également membres de Graduate Women International qui a été créée en 1919. On est étonné de voir que les Etats estiment que UWE habilitée par le Conseil de l’Europe a déposé des réclamations collectives ne serait pas recevable. Dans ce cas aucune OING de femmes ne l’est. Ce qui est ridicule. Pourquoi donne-t-on des droits d’exercer des réclamations collectives pour après refuser les critiques inhérentes à ce type de procédure ? 

    Pensez vous qu’il y a des pressions pour que ces réclamations collectives n’aboutissent pas ?  

    Anne Nègre : On peut se poser des questions en lisant d’une part les observations des Pays-Bas qui indiquent la concertation des Etats. Notons, cependant que le Portugal, la Suède ou même la France ne critiquent pas la recevabilité d’UWE. La Grèce estime quant à elle que lancer des telles réclamations contre les 15 Etats qui les acceptent, met en péril le système lui même. En d'autres termes, on peut émettre des critiques mais surtout ne rien changer ! Refuser de payer à égalité les femmes et les hommes pour un travail égal est un scandale qui perdure. je pense, qu'au contraire, ce combat devrait mobiliser les forces vives pour renforcer la démocratie.

    Est-il possible d'accéder à vos réclamations ?

    Anne Nègre : Oui elles sont sur mon site mais aussi sur celui du Conseil de l'Europe.

    Pensez-vous que les états aient la possibilité de gagner face à ces réclamations ?

    Anne Nègre : Oui, malheureusement. Ils peuvent exercer tous types de pression. 

    Est-ce encore une affaire financière ?

    Anne Nègre : Bien sur, cela serait couteux pour les entreprises et les Etats de payer au juste salaire les femmes, de mettre en place un système efficace de lois, de contrôle des lois. Les inspections du travail ne recherchent guère ces défaillances. Les exigences de preuve sont telles que généralement ils reposent sur la salariée. Si elle commence à s’interroger, à poser des questions, elle risque de perdre sont travail avant même d’aller en justice. Et comment aller en justice sans preuve ? Et pourquoi les frais d’un procès doivent reposer sur une salariée souvent modeste ? Il y a peu de succès judiciaire en la matière en Europe. Les juges ne sont pas curieux, ils pourraient exiger la production de documents sur les salaries comparés dans les entreprises, ils pourraient décider d’expertises internes aux entreprises à défaut de réponse.

    Pourquoi avoir attendu avant d'accepter de répondre à cette interview ?

    Anne Nègre  : je suis étonnée par le silence des médias. Je ne comprends pas. L'égalité ce n'est pas simplement une journée "le 8 mars" qu'il faut s'en soucier. C'est toute l'année. Il faut que nous nous mobilisions.

     

  • En avoir ou pas !

    Il y a quelques semaines, l'avocate Anne Nègre, experte égalité auprès du Conseil de l'Europe, déposait des réclamations collectives contre quinze états de l'Union Européenne pour non respect de la Charte Sociale européenne. Ni la France, ni l'Allemagne ni les autres ne respectent les lois en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes. La justice européenne a été saisie, mais bizarrement rien n'avance. Pour faire le point sur ce sujet, j'ai souhaité donner la parole à Anne Nègre afin qu'elle nous explique les enjeux de ces réclamations passées sous silence. 

     

    Vous avez passé 2 ans à monter ces réclamations collectives pour violation de la Charte Sociale, Pourquoi ? Quel est le but ?

    Anne Nègre : La Charte Sociale Européenne est en quelque sorte la Constitution Sociale de l’Europe, la Grande Europe celle du Conseil de l’Europe, car c’est un Traité du Conseil de l’Europe, de 1961. Depuis 1995 ces réclamations collectives sont aussi ouvertes à des organisations internationales non gouvernementales habilitées par le Conseil de l’Europe et 15 Etats Membres les acceptent, ils sont également des Etats Membres de l’Union Européenne. Il est clair qu’aucun pays en Europe ne respecte le salaire égal pour un travail égal entre les femmes et les hommes, ce faisant ils violent les dispositions de la Charte Sociale Européenne. Il s’avère qu’aucune réclamation collective n’avait, à ce jour, été déposée contre cette violation particulièrement grave et injuste qui touche toutes les femmes qui travaillent, quelque que soit leur niveau de qualification. L'une des premières conséquences, c'est que les femmes travaillent gratuitement en moyenne 2,5 mois par an. 

    Pensez-vous que l'égalité puisse arriver ? Est-ce là votre conviction ?  

    Anne Nègre : Oui si les citoyennes et les citoyens se mobilisent. Ce problème de l'égalité des saalires est crucial. Il doit être traité comme il se doit par les politiques, en mettant en place des structures juridiques et de contrôle efficaces. L'égalité est faisable si les preuves sont accessibles, si les juridictions saisies réagissent dans le bon sens, si les entreprises respectent les lois.

    Quels sont les états incriminés ? Pouvez-vous citer un ou deux exemples concrets ? 

    Anne Nègre : Les états vous avez la France, l'Allemagne, la Belgique, le Portugal, la Bulgarie, etc. Après, prenons l'exemple d'une femme qui travaille depuis 20 ans dans une entreprise. Elle constate que les hommes, engagés en même temps qu’elle, ont tous eu des promotions (ils ont des responsabilités reconnues) et donc des salaires correspondants. Dans les faits il ont fait la même chose. Ils ont le même job, mais on contourne l’égalité salariale en donnant des primes particulières uniquement aux hommes, justifiés par des horaires un peu différent. 

    Pensez-vous que les états vont vous laisser faire ?

    Anne Nègre : Non. Dans le cadre de ces 15 procédures, les états se sont concertés pour contester la recevabilité de Université Women of Europe (GEFDU/UWE) l'association avec laquelle j'ai déposé ses réclamations. Cette fédération regroupe des associations de femmes de divers pays européens qui pour certaines ont près de 100 ans. Elles ont toutes été à la pointe de tous les combats des droits des femmes. Toutes sont également membres de Graduate Women International qui a été créée en 1919. On est étonné de voir que les Etats estiment que UWE habilitée par le Conseil de l’Europe a déposé des réclamations collectives ne serait pas recevable. Dans ce cas aucune OING de femmes ne l’est. Ce qui est ridicule. Pourquoi donne-t-on des droits d’exercer des réclamations collectives pour après refuser les critiques inhérentes à ce type de procédure ? 

    Pensez vous qu’il y a des pressions pour que ces réclamations collectives n’aboutissent pas ?  

    Anne Nègre : On peut se poser des questions en lisant d’une part les observations des Pays-Bas qui indiquent la concertation des Etats. Notons, cependant que le Portugal, la Suède ou même la France ne critiquent pas la recevabilité d’UWE. La Grèce estime quant à elle que lancer des telles réclamations contre les 15 Etats qui les acceptent, met en péril le système lui même. En d'autres termes, on peut émettre des critiques mais surtout ne rien changer ! Refuser de payer à égalité les femmes et les hommes pour un travail égal est un scandale qui perdure. je pense, qu'au contraire, ce combat devrait mobiliser les forces vives pour renforcer la démocratie.

    Est-il possible d'accéder à vos réclamations ?

    Anne Nègre : Oui elles sont sur mon site mais aussi sur celui du Conseil de l'Europe.

    Pensez-vous que les états aient la possibilité de gagner face à ces réclamations ?

    Anne Nègre : Oui, malheureusement. Ils peuvent exercer tous types de pression. 

    Est-ce encore une affaire financière ?

    Anne Nègre : Bien sur, cela serait couteux pour les entreprises et les Etats de payer au juste salaire les femmes, de mettre en place un système efficace de lois, de contrôle des lois. Les inspections du travail ne recherchent guère ces défaillances. Les exigences de preuve sont telles que généralement ils reposent sur la salariée. Si elle commence à s’interroger, à poser des questions, elle risque de perdre sont travail avant même d’aller en justice. Et comment aller en justice sans preuve ? Et pourquoi les frais d’un procès doivent reposer sur une salariée souvent modeste ? Il y a peu de succès judiciaire en la matière en Europe. Les juges ne sont pas curieux, ils pourraient exiger la production de documents sur les salaries comparés dans les entreprises, ils pourraient décider d’expertises internes aux entreprises à défaut de réponse.

    Pourquoi avoir attendu avant d'accepter de répondre à cette interview ?

    Anne Nègre  : je suis étonnée par le silence des médias. Je ne comprends pas. L'égalité ce n'est pas simplement une journée "le 8 mars" qu'il faut s'en soucier. C'est toute l'année. Il faut que nous nous mobilisions.

  • Trump, la Chine et ses voisins

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    Ce matin a eu lieu la conférence Donald Trump face à la Chine. Rendez-vous pris au café Le Procope à Paris pour écouter et rencontrer notamment : Pascal Abb (chercheur au German Institute of Global and Area Studies), Emmanuel Dubois de Prisque (chercheur associé à l'Institut Thomas More), Yannick Mireur (directeur de Nexus Forum, politologue spécialiste des Etats-Unis) et Benoît de Tréglodé, (directeur de recherche à l'IRSEM). 

    Chacun a écrit un article dans le numéro 48 de la revue Monde Chinois. Dans l'éditorial co-signé Emmanuel Dubois de Prisque et Jean-Yves Heurtebise, il est indiqué "par coïncidence dont l'Histoire a le secret, le 9 janvier 2017, quelques jours avant l'investiture de Donald Trump décédait le philosophe juif polonais, naturalisé britannique, Zygmunt Bauman, qui dans son oeuvre démontra à quel point la société postmoderne qui est la nôtre est marquée par un brouillage de toutes les distinctions qui restaient fondatrices de la modernité". 

    Pour ma part, ce brouillage est très intéressant, car il est créatif. Il est comme le déséquilibre permanent de la marche. En ce sens, il nous fait revenir à ce que l'humanité a oublié d'elle-même : le nomadisme. 

    La revue se propose de résoudre une équation nouvelle "quel type d'influence l'administration de Trump pourra-t-elle exercer dans des pays situés dans la proximité immédiate de la Chine, où Pékin semble vouloir avancer ses pions de façon résolue, dans un contexte d'interrogations profondes sur la présence américaine ?"

    Ce sont en suite quinze articles qui sont proposés aux yeux du lecteur attentifs. Des articles pointus, longuement muris de recherches et de confrontations. Ce matin, quatre auteurs ont présenté les grandes lignas de leurs articles. Yannick Mireur propose une mise à plat explicite de la stratégie chinoise en mer de Chine afin de clarifier des enjeux commerciaux avec les Etats-Unis. Pascal Abb pose habilement la question de l'élection de Trump dans les yeux chinois. Résonne quelque part un "mais comment est-ce possible ?" Emmanuel Dubois de Prisque  propose un regard différent en partant de l'analyse de certains discours de Xi Jinping, il propose de s'interroger sur le côté législatif ancestral de la Chine. Cet aspect serait-il un empêchement pour la Chine d'avancer librement pour prendre la place de numéro un mondial ? Enfin Benoît de Tréglodé nous dessine la politique vietnamienne avec comme facteur la Chine. A-t-elle plusieurs possibilités ? Doit-elle valoriser ses échanges avec les États-Unis ou bien tenter un équilibre dangereux entre deux puissances ?  

    Evidemment, il ne faut pas résumer en une phrase ces interventions. Les articles proposent des éclaircissements sur une situation complexe. Chacun laisse la possibilité de s'interroger sur le rôle de l'Europe dans le futur équilibre du monde. 

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    Lors de la discussion, un invité soulève la question de la "critique" et pose comme équation que "la Chine n'aime pas être critiquée"... puis prend pour exemple des sujets du type "la censure, le Tibet, etc." et que "lors de sa visite, tous ses mails ont été lus"... 

    Nous sommes en France et à nouveau ces sujets...

    Pauvre pensée française... 

    Il est intéressant d'opposer déjà que l'ensemble de nos mails sont lus par Google, Facebook, etc. Que nos téléphones sont des espions formidables. Bref donc pas besoin d'être en Chine pour que nos messages soient vus. 

    Je vais ici davantage revenir à cette notion "d'esprit critique". Je ris, je ris, je ris... Sommes-nous capables de critiquer la France ou le pays d'où nous venons avec autant de force que lorsque nous évoquons la Chine ? 

    La réponse est non (voir mon article sur Shaoyo Liu)... 

    Pourquoi ? Car nous sommes, depuis notre tendre enfance, bercés dans une pensée occidentales. Celle-ci est faite d'hégémonie et donc de domination. Les occidentaux colonisent, dominent, domptent, imposent... Comme autour de cette table, finalement, les invités chinois n'ont pas pris la parole. Très peu, à la fin, certes. Mais reprenons, nous sommes, intolérants, voilà ce que nous sommes. Des donneurs de leçon. Je m'inclus, malgré moi, car j'appartiens à cette culture occidentale. Cette culture qui me limite, ferme mon regard. Cette culture dont je dois sans cesse repousser les limites pour voir autrement. 

    A chaque débat sur la Chine, il y a toujours cette crainte sous-jacente de la domination du monde par la Chine (voir mon article sur les craintes occidentales).

    C'est amusant, la Chine représente la plus vieille civilisation. Elle a tout vu, tout vécu, inventé mille techniques (que nous avons pillé par la suite)... et aujourd'hui, nous ne sommes pas capables de prendre des leçons de la Chine. A nouveau, au lieu d'écouter pour essayer de comprendre, d'appréhender, nous voulons imposer nos certitudes. Ne serions-nous pas devenus trop prétentieux ?

    Comment pouvons-nous croire que notre système de pensée est-il encore juste ? L'élection de Trump montre à quel point, nous sommes arrivés au bout de ce dernier. Il est à bout de souffle. Au lieu de nous asseoir pour en imaginer un de nouveau, nous souhaitons le poursuivre, le prolonger jusqu'à explosion complète de notre planète. Et le mieux, c'est que nous avons un coupable tout désigné en cas d'implosion de notre système : la Chine. 

    Cette pensée est bel et bien enracinée en tous les occidentaux. Le regard fixé contre l'ennemi. Là encore, j'insiste, nous devrions remercier Emmanuel Kant (pour sa leçon géographique de la philosophie), ou même les premiers jésuites venus en Chine pour la christianiser. Les difficultés qu'ils notèrent c'est qu'ils n'arrivaient pas à faire comprendre les concepts. Et oui, comment faire entendre une pensée enracinée à des esprits qui pensent mouvement, flux, système ?

    Des siècles plus tard, nous retrouvons les mêmes barrières. Les mêmes schémas mentaux. Sauf que comme à son habitude, la Chine écoute, cherche à intégrer, pendant que les occidentaux cherchent à imposer, un rythme, une pensée. D'un côté la Chine embrasse, pendant que l'Occident oriente, ferme, segmente. 

    Parler de la Chine c'est subsumer 56 ethnies, un territoire immense, varié. Donc, ne devrions-nous pas ouvrir nos yeux, nos oreilles et apprendre ? Pouvons-nous seulement appréhender une telle diversité ? 

    Pour qu'il y ait équilibre du monde, nous devons apprendre à voir autrement. A saisir le monde de façon plus poétique (dans le sens de son mouvement). Le monde est organique, vivant, mouvant...Il suffit de s'intéresser quelque peu à l'histoire de l'écriture chinoise, pour voir que la Chine l'a bien compris.

    Voilà ce que je retiens de cette rencontre : à nouveau notre rationalité doit être interrogée. Nous devons reconnaître les limites de notre culture, analyser nos propres défaillances. Ce n'est qu'à ce prix, que nous pourrons inventer un nouveau système inclusif, coxistentiel. Notre société ne sera réellement post-moderne que si nous acceptons de sortir de la modernité en re-formatant les lumières. 

     

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    Pour vous procurer la revue, rendez-vous sur le site des Éditions EKSA!