"Ce qui compte ce n'est pas le vote, c'est comment on compte les votes"
Joseph Staline
Aujourd'hui retour sur une drôle d'histoire : celle du vote blanc. Ce vote dont personne ne veut tant il remet en question tout le système. A une heure où le vote devient un exercice imposé, où les candidats sont choisis en fonction de leur télé-réalité... Revenons sur un droit qui réclame à nouveau son droit à exister... Juste pour dire "stop", "assez", "MERDE"... ou un simple "Vous nous entendez ?"
Vote blanc & suffrage universel
Le suffrage universel est entré en application en France le 24 avril 1848, pour l’élection des représentants à l’Assemblée constituante chargée de rédiger la constitution de la IIème République. Rappelons cependant que seuls les hommes peuvent voter (pas les militaires, pas les Français habitant à l'étranger ni le clergé). Pour voter, il faut avoir au moins 21 ans et résider depuis six mois au même endroit.
Parmi les multiples décisions réglant les questions de détail, aucune n’exclut les bulletins blancs. Pour la première élection d’un président au suffrage universel, ne sont exclus que les bulletins contenant une désignation inconstitutionnelle (décret du 28 octobre 1848).
Il faudra attendre la réaction bourgeoise menée par le général Cavaignac pour qu’une telle mesure soit prise (art. 57 de la loi électorale du 15 mars 1849). Elle sera confirmée par un décret de Louis-Napoléon Bonaparte du 2 février 1852, année où le président prend toute une série de mesures pour museler l’opposition lors des élections à venir ; quelques mois plus tard commencera la dictature impériale.
Le 13 juillet 1880, le député Bardou dépose à l’Assemblée nationale une proposition de loi qui fera autorité (elle est citée plusieurs fois dans diverses thèses de droit ainsi que pendant le débat au sénat sur la reconnaissance du vote blanc le 2 mai 1972).
Le vote blanc est abordé en ces termes : « (Le gouvernement) sera d’autant plus fort que dans chaque petit village, chaque Français aura sinon réfléchi, du moins été appelé à réfléchir. Peu importe qu’aucun candidat ne convienne, mettre dans l’urne un bulletin blanc c’est voter. » C’est la première fois que ce type de manifestation est reconnu comme ayant à part entière ma qualité d’un vote. Le texte se prolonge : « La conscience de chacun est donc respectée, la liberté ne reçoit pas d’atteinte. »
Ainsi le vote blanc n'a jamais été évoqué comme l'expression qu'il représente. Il semble incarner le respect fondamental de la liberté du citoyen. L’expression "mettre un bulletin blanc c’est voter" est reprise sans aucune adjonction ni précision dans les propositions de loi du 7 février 1889, du 7 juin 1921 par le député Baréty et du 24 mars 1927. Il faut tout de même noter qu’il n’est jamais explicitement fait référence à la prise en compte dans le calcul de la majorité de ces bulletins.
Et si on comptait quand même les votes blancs ?
Donc depuis 1852 jusqu'en 2014, le vote blanc n'était pas pris en considération. Il est assimilé au vote nul. En pratique, placer un bulletin blanc dans l'urne revenait donc au même que de voter avec un bulletin raturé ou de couleur, ces derniers étant considérés comme portant atteinte au secret du vote : ils pourraient servir à reconnaître l'auteur d'un vote après le dépouillement.
En février 2014, le parlement a décidé de reprendre en compte les votes blancs. Attention, cela signifie les comptabiliser, mais ne pas les considérer dans le calcul global.
Les votes blancs ne seront pas pris en compte dans les suffrages exprimés. Les suffrages exprimés représentent l'ensemble des bulletins, moins les votes blancs et nuls. Les votes blancs seront juste une indication, comme peut l'être le chiffre de l'abstention, mais ils n'auront aucune conséquence sur le résultat du cote.
«Il s'agissait de récompenser une expression positive de la vie politique que représente le vote blanc par rapport au vote nul, plus négatif, explique le rapporteur du texte. Une prise en compte de ce vote dans les suffrages exprimés aurait bouleversé notre vie politique. Il aurait été très difficile d'avoir un vainqueur lors de certaines élections.»
C'est quoi le vote blanc au juste ?
"Le vote blanc consiste à déposer dans l’urne une enveloppe vide ou contenant un bulletin dépourvu de tout nom de candidat (ou de toute indication dans le cas d’un référendum). Ce type de vote indique une volonté de se démarquer du choix proposé par l’élection." Dixit le site "Vie Publique"
Donc, lors des élections, quand on veut dire quelque chose, voter blanc... c'est possible. C'est l'ouvrir (sa bouche) sans pression. C'est montrer que les candidats proposés ne font pas l'affaire... Pas besoin d'insulte, pas besoin d'arguments (faibles répétés avec colère). Juste une enveloppe vide, ou un papier blanc.
Des liens pour aller plus loin :