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  • Et vous, seriez-vous la génération IKKS ?

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    Évidemment, il ne fallait pas que je tombe sur cette vitrine. Et, comme, nous sommes dans l'époque du "en même temps", nous dirons que la vie est bien faite, quand même. N'est-ce pas là un fabuleux sujet ou objet de la rentrée 2021 ?

    Il y a tellement à dire que je ne sais plus très bien par où commencer ? Mais nous allons prendre un à un les éléments leurs polysémies, leurs détournements, de sens, ou même leur absurdité... 

    Génération IKKS

    Alors évidemment, comme je suis "vieille", je prononce I.K.K.S, mais ce n'est pas du tout comme cela qu'il faut l'entendre ! Il faut dire "X"...  

    Génération X ou IKKS comme on peut l'entendre et surtout le voir à 0,03 secondes dans le spot publicitaire  "Nous sommes la GENERATION IKKS". 

    Mais qu'est-ce que cette génération en majuscules ? 

    Étymologiquement, le mot "génération" désigne ceux qui vivent à la même époque (voir la fiche du CNRTL).

    Cependant, selon la marque, être la génération IKKS c'est :

    Nous sommes la génération IKKS. Ceux qui ont choisi d’être des esprits libres, parmi les esprits résignés. Ceux qui ont choisi de ne plus obéir à l’absurdité, et de rester légers quand tout devient lourd. Nous sommes la génération qui va devoir réparer le monde ancien, pour laisser un monde meilleur à nos enfants, Qui seront comme nous. La génération IKKS."

    Séduisant, n'est-ce pas ? Afin de pousser la séduction plus loin, le message a son égérie : Lou Doillon. Comme le souligne le magazine Gala qui note "Autour d’une team ultra transgénérationnelle venue incarner cette génération IKKS si affranchie, un visage bien connu des français et des aficionados de la maison".

    Attention, car le site TF1 Pub, nous explique que le spot publicitaire "Conçu par Jésus et Gabriel, l’agence de publicité d’IKKS, et réalisé par Bonasia et Narcisi (production Bandits), le spot nous rappelle qu’à l'origine IKKS voulait dire "x" en phonétique et que les valeurs de la génération "x" transcendent les âges."

    Pendant que les publicitaires se congratulent, autour de l'action de prolonger l'attention du téléspectateur ou du wbespectateur... En se jouant des neurones de nos gentils observateurs (je cite : "Le principe : créer la surprise en liant la dernière image du jingle pub à la 1ère image du spot IKKS. L'intégration publicitaire favorise l'attention en plongeant progressivement le téléspectateur dans l'univers de la marque.") il y a une question éthique à laquelle, tous les marqueteurs vont devoir faire face : une fois que vous aurez détruit les neurones des consommateurs, une fois que la société sera définitivement entrée dans une "idiocratie", aurez-vous encore quelque chose à vendre ? Vous inventerez, sans nul doute, la connerie en tube ? Celle dont ne se lassera pas du biberon à l'assiette, en passant par la perfusion dans les rêves...  Mince c'est déjà fait... j'oubliais...

    Mais alors reprenons, ce qui doit ici être analysé : les erreurs de sens, ou plus exactement les fausses promesses (pour ceux qui ne connaissent pas le marketing, il y a bel et bien une "promesse" dans les stratégies marketing et publicitaire - voir le site des définitions marketing).

    "Nous sommes la génération IKKS" ou donc "X" - Quel est donc ce "Nous", vous ou moi ? Dire "nous", c'est assimiler tout le monde... Mais c'est étrange de vouloir subsumer ainsi une telle différence, car une génération partage une époque, ou du moins, un temps précis. Pas nécessairement une marque, à moins que l'on cherche ici, de façon subtile, à faire entendre que la marque IKKS passe de génération en génération (c'est d'ailleurs la fin de la publicité "Qui seront comme nous. La génération IKKS.")... Là, nous pouvons voir que tout ceci est très éloigné de la définition de la génération X... 

    Génération X ou IKKS ?

    Revenons à la classification de William Strauss et Neil Howe (cf. Millennials Rising : The Next Great Generation, New York, Vintage,

    Petites explications sur cette Génération X. Située juste après les baby-boomers de l'après deuxième Guerre Mondiale. Cette génération émerge au moment du déclin social, de la mondialisation de l'économie et la fin de l'impérialisme colonial. Les mutations économiques et sociales des années 1980 puis 1990, entraînent une crise de l'emploi (moins d'emplois stables, dévalorisation des diplômes, etc.).

    Sans oublier que le "X" est le signe aussi du déclin de l'environnement et de l'augmentation de la pollution (marrée noire, pollutions nucléaires...).

    Génération, de ce fait, nomade, pour laquelle rien n'est impossible... car finalement elle a connu les conquêtes spatiales, l'émergence d'internet... Elle a également refusé les discours religieux, ou du moins questionné les croyances... Face à tout cela, émerge la contre-culture... Et par contre-culture, il faut entendre les mouvements Punk, le Street-art, le Grunge, une littérature plus trash, plus affranchie qui casse les codes... pour ceux qui aiment les expériences, il faut écouter, par exemple : The Cure, Nirvana ou  Vision of Disorder ... Bref la Génération X n'est pas la Génération d'une marque... Mais poursuivons...

     

    Qu'est-ce qu'un esprit libre ?

    Deuxième phrase qui décrit cette "génération IKKS" : "Ceux qui ont choisi d’être des esprits libres, parmi les esprits résignés". 

    Même si je comprends cette image, je me demande ce qu'est un "esprit résigné" en ce début de XXIe siècle... Est-ce celui (ou celle) qui n'a pas d'autres choix que la pratique de plusieurs petits boulots pour payer son loyer ou son prêt ? Est-ce celui (ou celle) qui se lève tous les jours pour travailler en horaires décalés ? Est-ce celui, qui après avoir manifesté pendant des années, obtient une augmentation des tarifs du gaz, de l'essence après un gel de quelques mois ? Et il y a mille autres exemples...  

    C'est là où l'on se dit, qu'en fait, il s'agit bien d'une génération IKKS et non X, car au passage, la génération X est bien énervée et a bien sous tension (volontairement ou non) tous les gouvernements (que ce soit par les arts, par sa liberté de ton, par son refus d'appartenance, par ses pratiques...)...

    Mais revenons au plus important : "l'esprit libre". Bien que nous puissions nous demander si cela est possible à un esprit d'être libre (d'une part parce qu'il est enfermé dans une boîte crânienne et d'autre part parce qu'il obéit à des schémas physiologiques et psychologiques), nous devons nous référer à ce que signifie cette expression.

    Initialement, c'est l'Inquisition qui désigne, par "Libre-esprit" un courant de pensée qui se répand à travers l'Europe. L'esprit est libéré du superflu et put ainsi se consacrer à Dieu... Rappelons que l'Inquisition est un "tribunal" créé au XIIIe siècle par l'Église catholique et relevant du droit canonique dont le but est de combattre toute forme d'hérésie. En d'autres termes soit vous respectiez les dogmes de l'Église soit vous receviez une peine variant de simples peines spirituelles (prières, pénitences) à la confiscation de tous vos biens ou encore à la peine de mort.

    Il faut attendre Nietzsche pour que la notion "d'Esprit libre" désigne un esprit dégagé de tout préjugé. Le Freigeist de Nietzsche se trouve au chapitre II de son ouvrage Par delà le bien et le mal. Notons, cependant, que Nietzsche dénonce l'illusion du libre-arbitre, né d’une interprétation erronée de la psychologie humaine liée à l’emprise de la morale chrétienne sur la civilisation moderne. La liberté est alors une lutte de soi à soi pour déconstruire son savoir, ses émotions... 

    Vous voyez le paradoxe, comment pouvons-nous être libres si nous sommes IKKS (une marque donc) ?  Finalement n'est-ce pas être résigné que de porter des vêtements avec des slogans de liberté, ou encore avec des slogans du type "je fais ce que je veux" ou "laissez-moi faire ce que je veux" en anglais car cela passe mieux...

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    Petite citation de Nietzsche pour nous remettre de cette émotion "Si les esprits libres ont raison, les esprits serfs ont tort, peu importe que les premiers soient arrivés au vrai par immoralité, que les autres, par moralité, se soient jusqu'ici tenus au faux. - Au reste, il n'est pas de l'essence de l'esprit libre d'avoir des vues plus justes, mais seulement de s'être affranchi du traditionnel, que ce soit avec bonheur ou avec insuccès. Pour l'ordinaire toutefois il aura la vérité de son côté, ou du moins l'esprit de la recherche de la vérité : il cherche, lui, des raisons, les autres une croyance" (Humain, trop humain, I §225). 

    Je tiens à rassurer la marque IKKS, vous n'êtes pas la seule, à en vouloir à cette liberté, à ce doux miroir de l'esprit libre... Attention, 2021 vient avec son lot de liberté (paradoxale puisque commerciale) : le Club Med a lancé en mai 2021 son "esprit libre", la BNP a aussi ses formules "esprit libre", etc. Il y a même des thérapies, des coaching, des team-building... Bref du vide, du creux en somme...

     

    "Ne plus obéir à l'absurdité" :

    Mais oui que ce morceau de phrase est génial. J'adore ! (comme Dior, nan je plaisante). Si j'étais devenue une fan de Heidegger, je vous dirai que "ne plus obéir à l'absurdité" de notre existence, c'est en avoir fini avec le Dasein, à savoir l'être-là pour la mort ! Ce serait génial : finie la mort... une vie éternelle à baigner dans le consumérisme, avec le confort des marques pour se rassurer. C'est un peu comme cela que j'interprète cette phrase "Ceux qui ont choisi de ne plus obéir à l’absurdité, et de rester légers quand tout devient lourd."

    "Quand tout devient lourd" ? Qu'est-ce que cela signifie ? Notre monde est-il trop triste ? Face à cette tristesse, "soyons légers" car tout est foutu ? Oui "soyons légers" parce qu'il faut "s'en foutre". C'est vrai que notre actualité n'est pas top : les femmes à Kaboul, les attentats, les réfugiés climatiques, l'environnement, la pollution, la fin des ressources... Mais restons légers "consommons" donc sans nous poser de questions... Car c'est bien là que se referme le piège de l'attention

    Au fait, IKKS ? Vous fabriquez vos vêtements en France ? Vous évitez les polluants ? Vous n'exploitez personne ? Et votre entreprise est-elle le symbole de l'égalité salariale ?

    "Pour laisser un monde meilleur à nos enfants"

    Je vous cite, à nouveau "Nous sommes la génération qui va devoir réparer le monde ancien, pour laisser un monde meilleur à nos enfants"... Donc dans ce "nous" globalisant, la génération IKKS va "réparer le monde ancien". Belle intention mais  dans le faits ?

    Initialement, vous étiez bien une marque française, fondée, en 1987, dans un village à la Séguinière, par Gérard Le Goff. Pendant plusieurs années, vous avez intégré le groupe Zannier. Puis en 2015, vous êtes vendu au fonds White Knight de Lbo France un des premiers acteurs français du prêt-à-porter moyen/haut de gamme avec une diffusion large : magasin, corners et revendeurs multi-marques (voir l'article des Échos).  

    Personnellement ce qui m'amuse, c'est de découvrir grâce au Guide des marques, qu'initialement Gérard Le Goff voulait appeler sa marque "X", ce qui risquait d'être un peu gênant (le X ou la classification de la pornographie). Enfin bref, pourquoi un tel retour sur les origines de la marque ? Après être noyée, il faut la distinguer des autres comme The Kooples ou autre ? 

    "Pour laisser un monde meilleur à nos enfants" il faudrait déjà arrêter de les prendre pour des cons et leur donner la possibilité de s'ouvrir à l'esprit critique. Cela permettrait sans doute de "réparer le monde ancien" et de gagner à être des "esprits libres" ou plus exactement "libérés" d'une charge mentale faite de débilités sans nom... Bref un peu de sémiologie et d'éthique publicitaire seraient les bienvenues ! Car c'est cela, avant tout, la génération X... 

  • Comment communiquer sans Internet ?

    Une question est venue brutalement écourter ma nuit "comment communiquer sans Internet ?" Cette question se pose. Imaginons une coupure de courant, ou simplement un Internet en panne, ou hacké (comme en 2016 aux USA). Essayons de comprendre et de trouver une solution à cette question.

     

    1/ Comment fonctionnent nos smartphones ?

    C'est sans doute la première question à laquelle nous devons répondre. Car si notre téléphone vient partout avec nous... si nous nous en servons tous les jours, nous ignorons le plus souvent comment il fonctionne.

    Et il est vrai qu'il y a un côté magique à cet objet. Tout d'abord nous parlons, la parole que nous émettons modifie l'air qui nous entoure, et ainsi nous faisons vibrer la membrane du microphone. Notre voix est un signal analogique, sa variation est continue. Le microphone de notre téléphone, transforme ce signal en un autre signal dit numérique. Cette transformation est rendue possible grâce à un capteur MEMS (acronyme de Micro Electro Mechanical Systems) Ce signal numérique est codé en binaire. À cette épate notre voix est numérisée (à l'aide de 0 et de 1).  Ce signal est  ensuite capté en interne dans le téléphone pour être transformé en onde électromagnétique (au niveau de l'antenne interne de nos smartphones). Cette onde peut se déplacer dans le vide ou dans l'air (avec une vitesse proche de celle de lumière soit 300 000 kilomètres par seconde). Mais elle ne peut le faire que sur une courte distance et surtout sans obstacles (mur, arbre, etc.).

    Comme le souligne le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), les ondes électromagnétiques "correspondent aux oscillations couplées d’un champ électrique et d’un champ magnétique, dont les amplitudes varient de façon sinusoïdale au cours du temps. Elles transportent de l’énergie mais elles sont aussi capables de transporter de l’information".

    Les ondes électromagnétiques sont donc captées par des antennes relais (à proximité de là où vous vous situez). Elles vont renvoyer d'abord votre requête à un central dit MSC (Mobile services Switching Center ou Mobile Switching Center. Celui-ci correspond à votre opérateur (donc aux informations contenues dans votre carte SIM). Il s'agit de votre MSC de rattachement. C'est lui qui va transmettre votre requête au  MSC de rattachement de votre interlocuteur.

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    Plus qu'un long discours sur le fonctionnement de nos téléphones (intelligents de poche), une vidéo, issue de la chaîne Youtube Apprends l'engineering qui explique cela en quelques images.


     

    Nous voyons bien ici qu'en fonction d'une coupure Internet ou d'une panne générale d'électricité, nos smartphones ne nous serons d'aucune utilité. La seule exception serait de pouvoir transmettre les ondes électromagnétiques de notre téléphone directement à notre interlocuteur. Mais faut-il que ce soit en champ proche ? Et ceci est-il possible et comment ?

     

    2/ Communiquer avec son smartphone sans internet

    En cherchant, j'ai évidemment découvert quelques possibilités. Mais j'ai aussi pris conscience de la fragilité de ces applications qui au fil des années ont disparu. Mais voyons déjà comment cela peut être encore envisageable.

    En premier lieu, nous devons avoir :

    • un téléphone portable ou smartphone (ou même une tablette ou une montre connectée) qui soit compatible avec les applications ;
    • cette application doit être installée sur les différents outils (tablette, smartphones, montres...)
    • évidemment la distance entre les terminaux ne peut être que courte pour que la communication puisse avoir lieu.

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    Évidemment à ce niveau de proximité, il n'existe que deux technologies intégrées à nos téléphones qui peuvent nous aider à savoir le Wifi ou le Bluetooth. Ce sont ces deux techniques qui permettent le dialogue direct entre terminaux. Elles évitent de passer  par les infrastructures existantes des opérateurs téléphoniques. Nous pourrions ajouter la Li-Fi, technique qui passe par la lumière (LED) pour transmettre les informations. Mais si nous sommes face à une coupure générale d'électricité impossible l'utiliser.

    En 2014, il existait une application du nom de FireChat. Mais elle a disparu avec beaucoup d'autres dans les abimes du numérique.

    Quelques applications

    Cependant ces applications ne fonctionnent que si un grand nombre d'utilisateurs s'en servent. Chacun devenant le relais des uns et des autres. Il s'agit d'une chaîne de relais, en quelque sorte. En d'autres termes il faut que les téléphones aient encore de la batterie quelles que soient les conditions.

    3/ Communiquer sans Internet et sans smartphone

    Évidemment, c'est très étrange de faire cette liste de possibilités. Cependant, n'oubliez pas que votre smartphone est un formidable mouchard (pour ceux qui en douteraient encore, je renvoie à l'excellent documentaire Nothing to Hide). D'autre part, comme le souligne le site Résilience-Urbaine dans son article consacré aux communications en temps de crise "Si les relais de communications s’effondrent (catastrophe naturelle, saturation ou panne du réseau, perturbation électromagnétique…) votre smartphone ne vous sera plus d’aucune utilité."

    Il fut un temps où les lignes fixes auraient été utiles car elles étaient indépendantes d'Internet et non reliées à l'électricité ou à une box Internet. La technologie utilisée pour les lignes de téléphone fixe, le RTC (Réseau Téléphonique Commuté), repose sur un réseau de cuivre qui fonctionne avec des commutateurs installés dans les années 1970 qui seront bientôt obsolètes. « Les équipements et composants spécifiques à ce réseau deviennent obsolètes et des difficultés croissantes d'entretien apparaissent du fait de l'abandon de cette technologie par les équipementiers », explique l’Autorité de régulation des communications (Arcep). L'arrêt définitif est prévu en 2021.

     Quelles sont les autres solutions ?

    Autant dire que les solutions sont peu nombreuses, il me reste donc à me former... Comme quoi le confinement c'est utile...

  • La France, une maison ?

    "Tout langage est écart de langage" disait Samuel Beckett.

    La communication d'influence est un "sport de combat". Une habileté mêlant mise en scène, structure du discours qui glisse du non-verbal pour faire passer un message verbal. Pour les étudiants qui souffrent de mes cours, vous pouvez débuter votre apprentissage en regardant la série Scandal, ou en apprenant simplement à démonter les décors de ce qui se passe sous vos yeux tous les jours (ou évidemment en relisant le cours à votre disposition ici

    Une communication d'influence vise à infléchir les décisions publiques et politiques en faveur des marques et organisations (entreprises, groupements professionnels, …). En d'autres termes, vous (entreprise, homme politique, association, ONG, etc.) n'êtes jamais aussi forts que lorsque l'opinion publique vous suit ou plus exactement, vous précède. 

    La bizarrerie, comme l'a souligné Pierre Bourdieu en 1972, c'est que "L'« opinion publique » qui est manifestée dans les premières pages de journaux sous la forme de pourcentages (60 % des Français sont favorables à...), cette opinion publique est un artefact pur et simple dont la fonction est de dissimuler que l'état de l'opinion à un moment donné du temps est un système de forces, de tensions et qu’il n’est rien de plus inadéquat pour représenter l'état de l'opinion qu'un pourcentage" extrait de l'Exposé fait à Noroit (Arras) en janvier 1972 et paru dans Les temps modernes, 318, janvier 1973, pp. 1292-1309. 

    Bref l'opinion publique n'existe pas. C'est juste un prisme perceptif qui enclenche plusieurs processus psychologiques bien connus, à commencer par celui de "l'influence sociale"... suivi de "l'effet de gel"... ce qui finit par faire que chacun fait ce qu'il croit être juste ou vrai alors que tout ceci est simplement "crédible"... Donc bien une affaire de croyance.

    Donc comment cela fonctionne-t-il ? L'influence c'est avant tout une mise en scène. L'idée consiste à travailler le prisme perceptif du public, afin qu'il reçoive le plus simplement du monde le message.

    Il s'agit ni plus ni moins d'une mise en scène. On parle aussi d'architecture de la persuasion. L'exemple le plus simple étant au supermarché, soyez attentifs à ce qui se trouve à côté des caisses : en général des bonbons, des magazines, des petites bouteilles, des piles... Remarquez ensuite la hauteur (pile pour les yeux des enfants)... si vous ne cédez pas à la tentation immédiate, votre enfant lui va vous lancer des appels... C'est cela l'architecture de la persuasion. Pas d'inquiétude, la version internet existe aussi... 

    Aujourd'hui, nous allons regarder de plus près le journal de 13h du jeudi 12 avril 2018... Je n'ai pas vu le journal en direct, j'étais entrain de pique-niquer avec des étudiants... Oui oui.. Donc je l'avoue j'ai tout regardé bien après, sans passer par les commentaires, ..., des commentaires des commentateurs professionnels. 

    Première mise en scène : l'annonce de cette interview. "Le président Emmanuel Macron sera l’invité jeudi 12 avril du journal de 13 h de Jean-Pierre Pernaut sur TF1, pour un grand entretien en direct dans lequel il s’exprimera, entre autres, sur les conflits sociaux qui agitent le pays. Durant cet entretien d’une heure, qui sera diffusé également sur LCI, le président répondra en outre à des questions concernant la vie quotidienne des Français, et expliquera quel cap il entend donner à la France près d’un an après son arrivée à l’Élysée, a indiqué à l’AFP le directeur de l’information du groupe TF1 Thierry Thuillier." 

    Tels étaient les mots de la dépêche AFP du 7 avril 2018. Notons qu'il s'agit d'un "grand entretien". Que signifie "grand" ici ? Par la taille, par la durée ?

    Deuxième mise en scène : Dimanche soir, le 8 avril donc, TF1 a confirmé que l'émission serait diffusée en direct depuis l'école de Berd'huis, dans l'Orne. Selon une porte-parole de la chaîne, c'est Jean-Pierre Pernaut qui a proposé ce dispositif inédit au président, lequel a accepté cette idée.

    Troisième mise en scène : les chaînes se déchainent et vont toutes voir cette école "dite numérique", interroger les riverains, les retraités, etc.

    Bref, passons au jour J. 

    Quatrième mise en scène : le choix du 13h

    Qui ne connaît pas Jean-Pierre Pernaut, ai-je envie de dire ? Depuis 1975, il est présentateur sur TF1, notamment du journal de 13 heures depuis 1988. Il est à lui seul une institution, un moment de la télévision française. Il est l'invité de bon nombre de français. Il s'invite à table...  En septembre 2017, les audiences de son JT étaient déjà de plus de 5 millions de téléspectateurs soit 44% d'audience. En janvier 2018, les chiffres sont en hausse. Bref, nous ne sommes pas dans un moment d'intimité bien que tout soit mis en scène pour que nous puissions être face au président.

     

    Cinquième mise en scène : l'infantilisation

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    Tout commence par une introduction de Jean-Pierre Pernaut, on est donc rassuré nous sommes bien dans une école primaire, les enfants jouent, et il nous montre bien que nous entrons dans une classe de CE2 (oui c'est bien marqué sur la porte)... 

     En d'autres termes, le président va nous parler à hauteur d'enfants... Ce qui fait de nous "les enfants" du "père de la nation"... 

    Rappelons que tout public plongé dans un cadre infantile se met en situation suggestive d'enfant. Comme le souligne Noam Chomsky : « si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens critique que celle d’une personne de 12 ans » (cf. Armes silencieuses pour guerres tranquilles).

    Sixième mise en scène : "La France est une maison", "la maison France"

    “On est une maison, la France c’est une maison”, dont les fondations doivent être solides...

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    Attention, la France est une maison avec en arrière fond des dessins d'enfants représentant des maisons. Notamment la maison bleue sur fond jaune, nous laisse à penser que cette image est sans conséquence... 

    Soumise, comme tous, à l'influence, je me suis d'abord dit que j'avais fait une erreur de compréhension. J'ai donc vérifié en me rendant sur le compte Twitter du Président. La référence à la maison est bien là (12 avril à 13h25). 

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    Personnellement, j'ai bien cru m'étouffer en entendant, et, en lisant ces formulations. Donc petit retour à vos livres d'histoire (période : seconde guerre mondiale). 

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    Voilà la belle "Maison France" proposée par Pétain. Qu'y voyons-nous ? Les couleurs utilisées sont celles du drapeau français, cela incarne donc le symbole de l'identité et du patriotisme (drapeau que vous retrouvez derrière le président auquel on ajoute celui de l'Europe). Nous sommes bien "une maison".

    Les Piliers épais représentent donc les valeurs et vertus énoncées. Elles sont les bases de solidité et de stabilité du pays. En ce sens, l'école diffuse les valeurs de la République. L'Épargne symbolise le travail individuel. "Discipline, ordre et courage" font référence à la famille et à la patrie. 

    La maison est verdoyante, aérée, elle est symétrique. C'est une maison modeste où il est fait bon vivre. Pas de nuages dans le ciel d'une telle maison. Les nuages sont en dessous ou sur le côté... Rappelons également que les étoiles dans le ciel sont celles du Maréchal plus haut grade de l'armée. L'armée veille. 

    Il s'ensuit une réflexion sur "l'ordre public". Afin qu'il fonctionne il faut que "les règles soient respectées" comme le veulent “les gens qui payent leurs impôts”... Mais qui sont donc désormais les gens qui payent leurs impôts ? 

    Septième mise en scène : l'effort

    Donc là c'est simple il faut une répétition "Je suis le Président de tous les Français" et évidemment remercier les retraités pour tous leurs efforts.

    Cependant, une erreur de langage se glisse «Je suis le Président de tous les Français. Les riches, ils n'ont pas besoin d'un Président, ils se débrouillent très bien seuls.»...

     

    Essayons de conclure : si j'ai bien compris, à hauteur d'enfant, il semble que ma maison soit de travers et que je sois désignée comme une "professionnelle du désordre" (pour reprendre l'expression de cette interview). Afin de vous faire comprendre à quel point le langage est un écart à lui-même, je vais utiliser à nouveau des mots issus de cette interview, car ils pourraient être les miens, les vôtres... “je veux changer beaucoup de choses et pour moi il n’y a pas de répit.” Ces mots correspondent parfaitement à la philosophe du désordre que je suis...

     

  • Et la crue ?

    Premier workshop "images et photographies" hier au sein de l'ISEG Paris...

    Attention, si nous sommes partis de l'analyse de l'image. Mais qu'est-ce donc qu'une image ? Faut-il penser à Gaston Bachelard et à son paradoxe "l'image ne peut être étudiée que par l'image, en rêvant les images telles qu'elles s'assemblent dans la rêverie" ? Faut-il repenser à Jean-Luc Godard "il faut confronter les idées vagues avec des images claires" ? 

    Nous avons quitté la salle de classe. Ciel ! Nous avons pris le métro, affronté les mots et confronté les images. Quoi mais Paris, c'est grand, où sommes-nous ? Direction là où sont toutes les télés du monde... Non pas à la FNAC ou à DARTY. Mais bien là où le Zouave se noie.

    La crue en images

    Votre mission "voir la crue sous un autre angle"... Ah oui mais lequel ? La question n'est plus qu'est-ce qu'une image mais "que donnez-vous à voir ?"

    Je rappelle ici que j'avais fait un article sur les "10 astuces pour réussir vos photos avec votre smartphone"... Donc je ne vais pas me répéter sur cette technique. En revanche ce que je sais, c'est qu'une image n'a pas à être bonne à mes yeux, elle doit toucher votre public, elle doit émouvoir (dans le bons sens étymologique de l'émotion : mettre en mouvement)...

    Vous ai-je dit que l'exercice commençait dès que nous sortions de la salle de classe ?

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    Rendez-vous avec le Zouave...

    Le Zouave du pont de l'Alma est une statue qui date de 1856 réalisée par Georges Diebolt (un sculpteur français né en 1816 et mort en 1861 - diplômé des Beaux Arts et qui a obtenu le prix de Rome en sculpture pour son bas-relief La Mort de Démosthène en 1841). 

    Aujourd'hui le Zouave est bien seul sous le pont de l'Alma, mais rassurez-vous  le Chasseur à pied, l’Artilleur et le Grenadier ont été déplacés sur d'autres sites. Ils représentent tous les troupes ayant participé à la guerre de Crimée remportée (par les Anglais, Français, les Turcs Ottomans et un corps expéditionnaire piémontais contre les Russes) à la suite de la bataille de l'Alma en 1854. 

    Le Zouave se noie-t-il ?

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    Oui, semble nous dire Nathan Schoulal, nous ne voyons plus ses pieds et l'eau file à toute vitesse... 

    Oui encore nous suggère Manon Sévin en vue panoramique...

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    Pas vraiment nous dit Traore Abdoulaye, en regardant sous les jupes du Pont de l'Alma. Mais il est vrai que l'on ne voit plus très bien les jambes du Zouave.

     

    Pourtant il y a urgence, il y a même "précipitation" nous dit Lola Duplaa.

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    Sous un autre angle cela donne quoi ?

     

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    Faut-il croire que la coupe est pleine comme le suggère

    David Dehe ?

     

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    Prendre une image, c'est prendre des risques.

    C'est jouer avec l'équilibre des êtres.

    C'est aussi avoir la tête dans les nuages. 

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    C'est aussi s'apercevoir que l'on a pris la même image sans le savoir...

    Alors un regard ne doit-il pas se travailler in situ ? 

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    Une image pense

    Paris est une fêlure nous suggère Sarah Dicoh. Paris craque sous les eaux.

    Voilà un cadre, voilà un corps qui photographie, interroge l'espace et dessine un regard...

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    Ici nous rejoignons les mots de René Magritte  : "Je peins l'au-delà, mort ou vivant. L'au-delà de mes idées par des images" 

    À suivre...

    Pour les étudiants le cours est accessible en suivant ce lien... Cliquez et tapez le mot de passe fourni par mail...