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justice

  • De l'inégalité

    Des années de luttes intellectuelles, de combats de rue, de mises en évidence ne suffisent pas à passer d'une égalité de droit à une égalité de fait. C'est donc bien que quelque chose demeure dans notre manière de percevoir l'égalité qui ne colle pas avec notre perception du monde. 

    Mathématiquement, nous savons que deux grandeurs sont égales quand elles ne diffèrent en rien. En revanche, pour nous, les êtres humains, l'égalité signifie que nous avons un attribut en commun "notre humanité" au regard duquel nous devons être traités de façon identique. Que nous soyons grands ou petits, femmes ou hommes...

    Quand on le dit, quand on l'énonce, rares sont ceux qui vont vous répondre qu'ils sont contre cette idée. Il y a donc une convenance intellectuelle à être pour l'égalité. Cependant, il suffit de lire le Rapport sur les inégalités en France (2021) publié par l'Observatoire des inégalités pour comprendre que l'égalité de traitement des être humains est loin d'être acquise. 

    Anne Bergheim-Nègre, inégalités, essai, route de la soi -éditions, livreC'est en partant de ce constat et des levées de bouclier face à ses combats pour établir une égalité de fait que Anne Bergheim-Nègre s'est plongée dans la rédaction de son essai Histoire de l'inégalité entre les femmes et les hommes

    Elle réussit à nous entraîner au coeur de notre culture, elle est allé chercher le lieu même où s'enracine notre culture des inégalités. En décortiquant l'histoire, les textes religieux avec malice, Anne Bergheim-Nègre, nous fait prendre conscience de l'envers de notre pensée pour l'égalité. Elle met en évidence notre incapacité à se défaire de nos récits anciens, si imbriqués dans notre cognition que nous finissons par ne plus avoir la capacité de nous en détacher. Nous finissons donc par nous accommoder de fragment d'égalité. Or ce morcèlement de l'égalité n'a rien de bon, il fait vivre encore plus fort les inégalités. 

    Si nous regardons de plus près nous voyons que dès la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (de 1789) cette séparation des égalités entre de fait et de droit est affirmée "les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits". Cette précision est importante et est confirmée par l'article 6 " La loi est l'expression de la volonté générale, tous les citoyens ont droit de concourir, personnellement ou par leurs représentants, à sa formation ; elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics selon leur capacité, et sans autres distinctions que celle de leurs vertus et de leurs talents". Nous pourrions questionner le mot "vertus" ici car là encore ce texte, nous el savon s'adresse à des hommes pour des hommes (et non le "h"n'est pas une majuscule et n'englobe pas les femmes). 

    Donc Anne Bergheim-Nègre remonte le temps historique, elle nous fait découvrir les rouages de cette affirmation de l'égalité des hommes et de leur domination sur les femmes. Elle montre le prisme cultuel et culturel qui ont mis en oeuvre cette domination dont nous ne nous satisfaisons pas, mais avec lesquels nous avons appris à vivre. Elle met en évidence que déjà dans la manière dont on nous enseigne la préhistoire on retrouve ce récit de domination (rejoignant ainsi les travaux de Marylène Patou-Mathis ou encore ceux de Marija Gimbutas). 

    Anne Bergheim-Nègre met en évidence combien les transformations des structures des états a toujours été menées au profit des hommes (voir notamment le chapitre sur Napoléon Bonaparte). Cependant, loin de nous pousser à croire que l'égalité est impossible, elle met en évidence toutes les luttes menées, tous les combats, une longue marche vers une égalité encore possible. On y lit l'aspiration sociale. Qu'elle soit portée par quelques-unes ou par un grand nombre c'est cette aspiration qui pousse vers l'égalité dans les faits.

    En d'autres termes, l'égalité des droits, ne peut pas être purement formelle et illusoire. La question est de savoir si elle ne doit pas reposer sur des moyens identiques et à la limite sur l'égalité effective des conditions sociales ? C'est sans doute là un idéal égalitariste. Et pourquoi pas ? C'est bien ce dont nous avons besoin pour poser les jalons d'une société égalitaire pour un futur en commun ! Particulièrement dans la sphère numérique... 

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  • La claque de Valls à la cour de cassation

    Ce vendredi 13 janvier 2017,  en présence des plus hauts magistrats de France mais aussi d’avocats, des représentants des institutions nationales et de la société civile et du garde des Sceaux, la Cour de cassation a tenu son audience solennelle.

    Pourquoi évoquer ici les "voeux" de la cour de cassation ? C'est amusant non ? Je plaisante... Vous pourriez me dire que cela n'a rien à voir avec le titre annoncé. Ah bon ? 

    Avant de perdre votre attention, une illustration. 

     

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    Rappel : qu'est-ce que la cour de cassation ?

    La Cour de cassation est la juridiction la plus élevée de l'ordre judiciaire français. Elle est, dans ce dernier, le pendant du Conseil d'État dans l'ordre administratif. Elle comprend une "chambre criminelle" et cinq "chambres civiles" (sociale, commerciale, droit des personnes, responsabilité civile, droit immobilier).

    Elle prononce donc prononce la cassation et l'annulation des décisions de justice qui ont été rendues au prix d'une méconnaissance de la loi. 

    Rappelons, par exemple, que dans le cadre de l'affaire (historique) Alfred Dreyfus, la Cour de Cassation a prononcé, en 1898, un arrêt qui évita que Dreyfus termine ses jours à l’île du Diable.

     

    La claque de Valls à l'indépendance de la cour de cassation 

     A la veille de son départ, Manuel Valls, premier ministre démissionnaire et candidat "socialiste" à la tête de l’Etat, signe discrètement un décret avant de confier ses fonctions à Bernard Cazeneuve.

    Ce décret n° 2016-1675 du 5 décembre 2016 innove en République d’une manière stupéfiante en « portant création de l’inspection générale de la justice ». En d'autres termes, l'exécutif prend le contrôle des juridictions judiciaires. 

    Ce contrôle existe déjà mais se limitait aux juridictions « du premier et du second degré ». Pour faire simple les tribunaux de grande instance et les cours d'appel. Mais le décret du 5 décembre supprime cette précision, faisant de facto entrer la Cour de cassation dans le champ de l'exécutif. Or, jusqu'ici, la plus haute juridiction française se contrôle elle-même, faisant une fois par an un rapport sur son fonctionnement à l'occasion de sa rentrée solennelle.

    Elle peut par ailleurs être auditée par la Cour des comptes, qui veille au bon usage des deniers publics.

    N'est-ce pas là une claque (pardon une gifle) démocratique phénoménale ?

     

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  • Françafrique, l'envers de la dette

    Quand on pose la question de l'argent dans l'histoire, on finit par comprendre l'envers d'un certain décor. Ici François-Xavier Verschave nous explique l'envers de la dette. 

    Économiste de formation, François-Xavier Verschave (1945–2005) membre fondateur de l’assocciation Survie est notamment l’auteur de La Françafrique (Stock, 1998) et de Noir silence (Les Arènes, 2000).


    Dans son texte publié par Agone, il explique qu'il "ne manque pas d’ouvrages sur le pétrole, sur la dette, sur les trafics d’armes, sur les guerres au Congo-Brazzaville et en Angola, avec leurs cortèges d’horreurs et de destructions. Il manquait de tisser ensemble ces divers éléments. C’est l’objet de ce “Dossier noir”. Le brassage continu de l’or noir et de “l’argent noir”, du pétrole offshore (au large) et des capitaux offshore (dans les paradis fiscaux), des spéculations inavouables sur le pétrole, la dette et les fournitures de guerre dessine alors un paysage où criminalités économique et politique entrent en synergie. Il devient évident qu’un certain nombre d’acteurs, les plus conscients, participent à un “groupe criminel organisé”, au sens où le définit la future Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, dite Convention de Palerme. Ils n’ont pas conscience, en revanche, que peut leur être collée cette étiquette, car ils évoluent depuis trop longtemps dans les espaces sans loi, les no man’s land déshumanisants d’une mondialisation dérégulée, avec la quasi-assurance de l’impunité.
    Ce dossier voudrait aider à une prise de conscience, de la part notamment des victimes et des ingénieurs de ces machines à piller, à ruiner, à broyer. Les victimes découvriront que ces mécaniques ne sont pas si lointaines que ça, incompréhensibles, anonymes, insaisissables : les flux mortifères impliquent des personnes et des sociétés précises, l’argent passe inévitablement par des comptes archivés, dans des banques “honorables”. La dette apparaît comme une “double peine”, s’ajoutant à tous les malheurs et préjudices qu’infligent à la population la razzia, l’extorsion, l’exploitation inique de ses matières premières. Décrire les articulations de ces dispositifs ne permet pas seulement d’illustrer leur caractère moralement insoutenable : cela multiplie les motifs d’incrimination. Manifestement, la quasi-totalité des contrats sous-jacents sont illégitimes, illégaux, peuvent être frappés de nullité et donner lieu à réparations. Les victimes peuvent demander beaucoup mieux que l’effacement charitable de leurs dettes : elles peuvent exiger d’être rétablies dans leurs droits. Une bataille juridique qui est aussi politique, puisqu’elle contribuera à asseoir un nouveau droit international."

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