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Sorties (ré)créatives - Page 2

  • 21 rue des sources

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    Quel doux nom de rue. Ne trouvez-vous pas ? Elle chante comme une fontaine de jouvence. Le jour s'y lève sur les rêves d'une famille. Une vie. Des vies. Une mélodie familiale. La guerre et ses frayeurs : ses découvertes et ses pertes. Le bruit des bombes, des premières amours. La maison tient toujours. Solide bâtisse où tout y vit, tout y vibre, même les ombres. Surtout les ombres. À hauteur d'enfant, nous nous glissons dans leurs coulisses. Nous savourons les pommes, ramassons les fleurs, jouons avec le chien. Ce chien qui du fond des âges nous revient. Comme une lumière de printemps.

    Fin de la guerre, la joie, la libération. La maison ouvrière est devenue bourgeoise. Changement de génération autour d'une maison "épicerie".

    Que trouvons-nous dans une épicerie ? Des odeurs, des saveurs, des trucs, des astuces. Nous sommes ici dans une pièce de Philippe Minyana. Nul doute possible. Les inventaires des délices comme des silences sont là. Les détails s'écrivent autour d'une facilité de la langue. Facile cela signifie juste. Efficace. Sensible. Hyper-sensible pour être à la mode. Toujours à la limite. Toujours à la faille. Toujours face au précipice.

    Une joie sautille, un humour grinçant se dessine. C'est pur, c'est tendu. Cette langue fragile et douce, forte et féroce, nous accompagne. Elle est souple. Elle virevolte. Elle sait se saisir du temps. Suspendue, elle regarde l'espace. Il n'y a pas de plus belle langue théâtrale.

    Soudain. Vous vous surprenez à en dire les mots. Elle est dans votre mémoire. Elle joue avec vous. Elle vous invite dans cette maison pour une visite extraordinaire et joyeuse.

    Assis, debout, volant. Vous êtes là. Vous suivez cette langue. Avec elle, vous prenez corps dans le souvenir. Deux fantômes vous y accompagnent. Laurent Charpentier et Catherine Matisse.

    Deux lueurs, je n'ai pas envie de dire "acteurs". Deux fantômes, deux présences incroyables. Deux voix splendides. Deux chants. Deux histoires parallèles. Ce dialogue est-il possible ? Il est une joie, une tendresse, une jubilation. Corps, sans corps ou double perspective des souvenirs.

    Ils jouent de pièce en pièce, de charme en charme. Ici la cuisine. Ici le salon. Ils nous entraînent dans les méandres de cette maison. Regards sur leurs passés croisés, communs. Tout se déplie. Ils touchent en écho. Grandeurs et décadences de cette famille. Dès les premières phrases, nous sommes cueillis. "Fatigués de cette journée..." Invitation au voyage.

    « Tu les entends ? » « Oui je les entends. » Mais qui entendons-nous ? Qui attendons-nous ? Deux fantômes énigmatiques. Fiers de leurs beaux costumes retrouvés ? Sincérité étincelante des choix de Raoul Fernandez (costumier). Le blanc. Plus tout à fait blanc. Blanc du mariage, de la mort, des souvenirs écornés.

    Nous aussi, nous les entendons. Au milieu des souvenirs, jaillissent les HLM, les voitures, la fin des Trente Glorieuses. Nous suivons le fil. Cette lumière tendre d'où procède l'imaginaire. L'espace se dessine furtif. Nous allons de pièce en pièce avec les nuanciers de Marylin Alasset (scénographie /lumière). Qu'il est doux de donner l'espace à l'imaginaire du spectateur. Il peut ainsi vagabonder dans les photos souvenirs, les joies perdues, les innocences cachées, les rires, les maladresses. Tout se conserve dans cette famille.

    Et puis il y a cette douce mélodie. Ponctuations de notes qui nous conduisent entre les larmes des souvenirs et les joies des drames. Nicolas Ducloux se joue du piano. Il épaissit les souvenirs. Il redonne du corps à ses deux fantômes. Nos deux amis de la soirée.

    « C'est là que je suis morte » dit madame Avril. « Je me suis offert un platane » dit l'Ami. Écoutez, il n'y a pas de drame. Juste la vie. Pas de tristesse. Juste de la mélancolie. « L'ordre des choses est toujours un désordre » dit l'Ami.

    Comme le souligne Philippe Minyana "Les Mots fabriqueront la Fiction ! Et on entendra la belle et terrible histoire des Trente Glorieuses ; métamorphoses et mutations ! Passions et mortifications ! Une vie, des vies ordinaires, donc exemplaires. La vie d'une maison comme la métaphore d'une civilisation en mouvement, comme le reflet d'un fragment d'histoire. Vérité déformée, aléatoire, universelle."

    J'ai aimé ces fantômes. J'étais bien avec eux au coeur de la malice de leurs souvenirs. Avec eux se dessine la profonde tendresse de l'auteur pour l'humanité des humbles. 

     

    ___________

    Texte et mise en scène : Philippe Minyana
    Avec : Laurent Charpentier, Catherine Matisse
    Pianiste : Nicolas Ducloux
    Costumes : Raoul Fernandez
    Magie : Benoit Dattez
    Scénographie / lumière : Marylin Alasset
    Assistant à la mise en scène et servant de scène : Julien Avril

    Durée : 1h30

    Production : Centre Dramatique National Nancy Lorraine, La Manufacture
    Coproduction : La Passerelle, scène nationale de Saint-Brieuc ; Comédie de Caen, CDN de Normandie ; Théâtre du Rond-Point, Paris
    Texte lauréat de la Commission Nationale d’Aide à la Création de textes dramatiques-ARTCENA
    Compagnie en résidence à La Passerelle, scène nationale de Saint-Brieuc

  • Rabbit Hole

    0x1200x17698-or.jpgNous sommes vendredi 18 janvier 2019. Le froid bat les pavés parisiens. Les discours volent en tous les sens, comme autant de commentaires infinis sur le désordre social. Tout ceci rime dans mon esprit avec l'absence de réflexion, de mise en perspectives (un effondrement d'un système ne signifie pas la fin de tout, mais bien la nécessaire mise en commun de nos réflexions pour en élaborer un autre - cf. Traces de révoltes). Serions-nous en dissonance cognitive collective ? 

    Pourquoi cette introduction me direz-vous ? Parce que nous sommes des corps situés. Le contexte d'une rencontre, d'une découverte importe donc pour comprendre ce qui é-meut. Rendez-vous donc au Théâtre des Bouffes Parisiens pour découvrir la pièce Rabbit Hole.

    Il fait froid, il fait nuit, la journée a été longue de ces contradictions permanentes, et je ne vous cache pas mon a priori énorme à voir une pièce qui nécessairement allait me faire remonter des souvenirs.

    Lorsque j'ai lu le résumé de la pièce, mon envie de faire demi-tour était grande : "Une création tout en nuances et en émotions. Comment des parents peuvent-ils se remettre de la perte d'un enfant...? Loin des facilités du pathos, cette histoire nous plonge dans le quotidien d'une famille tentant de se reconstruire. Un quotidien sensible, lucide, souvent drôle, même, qui transcende les petites choses de l'ordinaire pour faire vibrer la profondeur de l'humain." 

     

    Disparaître ou continuer à aimer ?

    Quel est donc cet endroit où nous pourrions nous cacher ? Cacher notre douleur de cet amour impossible à se détacher de nous-même ? Sans doute est-ce là l'enjeu du "Rabbit Hole", ce trou de lapin où nous aimerions tous nous cacher quand rien peut aller à la suite de la perte tragique d'un enfant (ou d'un proche). David Lindsay-Abaire, l'auteur américain de cette pièce a sans doute eu cela en tête lorsqu'il a décidé d'écrire avec force et sincérité l'histoire de ce couple huit mois après la disparition de leur fils. 

    C'est  donc l’histoire de Becky (Julie Gayet) et Howard (Patrick Catalifo), qui tentent, chacun à leur manière de faire face à la mort de leur enfant de quatre ans, fauché par une voiture alors qu'il courait après son chien. L'univers bascule, les souvenirs envahissent le présent, la perte occupe l'espace de cette maison. L'onde de choc parcourt le plateau. Comment revenir à la vie ? Comment aimer à nouveau ? Le couple est entouré ici de Izzy (Lolita Chammah), la sœur de Becky qui tombe enceinte et ne sait pas comment l'annoncer à sa soeur et Nat (Christiane Cohendy), leur mère. 

     

    Dire avec le tranchant de l'humour

    Comment faire disparaître cette boule (de douleur) au fond de soi qui empêche d'avancer ?  David Lindsay-Abaire se joue des mots, du quotidien. Tout se révèle au fur et à mesure de la pièce. Les situations, les gestes, les phrases rien ne doit dépasser, rien ne doit provoquer le chagrin, la douleur des parents. 

    Là où je m'attendais à du pathologique, du drame en noir : surprise ! L'humour implacable de la langue et des absurdités du quotidien sont mises en avant. À chaque instant, jaillit un trait d'humour. Quand Becky parle de la crème caramel, quand Izzy raconte son altercation en boîte de nuit, ou quand Nat évoque le bruit autour des jouets offerts... L'humour noir entre Becky et Howard. L'humour tragique jaillit aussi au moment où les personnages perdent le contrôle, ne voyant plus leur maladresse (je pense ici où Nat évoque avec insistance la malédiction du clan Kennedy). 

    Il y aussi le renversement de nos biais cognitifs, nous pensons immédiatement que Howard semble plus armé pour survivre au drame et renouer avec une vie "normale"... Mais une fois au coeur de leur quotidien on s'aperçoit que la situation est plus complexe. Les douleurs respectives du couple mais également de leurs proches résonnent en écho. Comment s'en sortir ? Comment vivre après la perte ? "Rien ne sera plus comme avant" alors à quoi bon chercher ? 

    Ce fragment de vie passé au microscope, nous fait voir une chose remarquable: la vie en elle-même. Vivre c'est s'accrocher, se raccrocher, c'est un déséquilibre. Vivre, c'est faire résonner nos écorchures plus ou moins profondes. Sans cesse, sur le fil de l'humour. Il ne faut pas vous tromper en lisant le résumé de cette pièce, le fil conducteur n'est pas le pathologique mais l'amour (et son liant universel l'humour). 

     

     

    Des acteurs remarquables 

    Comment entrer dans ces rôle complexes sans y laisser des plumes ? Comment faire la part des choses entre les douleurs des personnages et ses propres douleurs ?

    Je dois avouer ici que j'ai complètement découvert Julie Gayet. Une révélation en mère forte et fragile. Elle incarne Becky. Elle veut dire sa douleur de mère tout en cherchant à faire sans son fils. En violences contenues, en mots jetés, rattrapés, en gestes pour dire sans dire. Je l'ai trouvée renversante de sincérité.  

    Face à elle, Patrick Catalifo incarne Howard (son mari). Une présence scénique puissante et fragile. On le voit comme mari, mais il est le père. Et c'est dans ce renversement permanent du père qui veut dire sa douleur et du mari qui veut aider sa femme à s'en sortir que Patrick Catalifo prend une dimension magnifique. 

    Lolita Chammah incarne Izzy (la soeur) de façon à la fois sublime et fantasque. Une énergie à toute épreuve, un humour incisif, une belle et attachante présence. 

    Renan Prévot qui incarne le jeune conducteur joue à la perfection sa présence fragile, perdue, déboussolée, déboussolante. 

    Christiane Cohendy (Nat) en mère de Becky est totalement bouleversante de justesse. Elle une palpitation. Elle qui doit ou devrait consoler sa fille, tout en soutenant la grossesse de son autre fille, tout en pleurant la perte de son petit fils, tout en revivant la mort de son fils. Il y a chez Christiane Cohendy une magnifique facilité à être ce personnage. Elle lui donne corps, faisant régner la mélodie des fractales temporelles.

     

    Comment conclure ?

    Maison ouverte, mouvante. Claudia Stavisky et le scénographe Alexandre de Dardel ont mis en écho les souvenirs par des jeux d'espace qui se plient, se replient, se déplient. Où l'humour transcende la douleur, où les pas des uns font danser les souvenirs des autres. Ainsi portée et orchestrée, Rabbit Hole est une pièce qui donne envie de retrouver sa joie de vivre, son humanité. Une bouffée d'air frais. Une véritable leçon d'amour.

     

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    Mise en scène : Claudia Stavisky 

    Adaptation : Marc Lesage

    Distribution : Julie Gayet, Patrick Catalifo, Lolita Chammah, Christiane Cohendy, Renan Prévot

    Informations & Réservations : Guichet - 4, rue Monsigny,  75002   Paris

    Tél. location : 01.42.96.92.42 / 01.42.96.92.44 Fax location : 01.42.86.88.73

     

     

     

     

  • Traces de rêves

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    Qu'est-ce qu'un rêve ? Serait-ce un insaisissable ? Une brume légère qui descend sur notre cerveau, qui l'assouplit, l'enveloppe, le réchauffe, l'étire, l'étend ?

    Nous allons, nous venons dans un monde qui va l'envers du temps. Nous allons et venons dans l'urgence de nos gestes quotidiens. Mais alors où sont logés nos rêves ? Existe-t-il une trace de ceux-ci ? Où est-elle ? 

    Le spectacle Traces de Rêves c'est un peu tout cela à la fois : un rêve, une proposition, un lieu, une respiration, un engagement.

    La Possible Échappée  est une association qui a mis en place une pédagogie artistique à destination des artistes en situation de handicap. Pour ce spectacle ce sont les participants de l’atelier de danse du foyer de Fleury à Meudon qui ont travaillé sans relâche pour réussir à nous transmettre leur part de rêves. 

     

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    Traces de rêves est autant un voyage initiatique que poétique. Au départ de ce rêve, le somptueux texte de Henri Michaux « La paresse », Mes propriétés (1930), dans La Nuit remue (Poésie Gallimard, p. 110-111). 

    Fermer les yeux, laissez-vous emporter par la voix... 

    "L'âme adore nager.
    Pour nager on s'étend sur le ventre. L'âme se déboîte et s'en va. Elle s'en va en nageant. (Si votre âme s'en va quand vous êtes debout, ou assis, ou les genoux ployés, ou les coudes, pour chaque position corporelle différente l'âme partira avec une démarche et une forme différentes c'est ce que j'établirai plus tard.)
    On parle souvent de voler. Ce n'est pas ça. C'est nager qu'elle fait. Et elle nage comme les serpents et les anguilles, jamais autrement.
    Quantité de personnes ont ainsi une âme qui adore nager. On les appelle vulgairement des paresseux. Quand l'âme quitte le corps par le ventre pour nager, il se produit une telle libération de je ne sais quoi, c'est un abandon, une jouissance, un relâchement si intime".

    Entrez, la brume descend légère, elle laisse entrevoir un premier tableau chorégraphique. Un balancier léger des corps. Un regard. Une entrée. Chut. L'âme s'étire, s'étend, s'enveloppe... Elle s'entoure légère des parures de l'imaginaire.

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    Neuf danseurs nous font voir, entrevoir la lumière de nos rêves. L'âme adore nager, elle vagabonde d'images en tableaux, de couleurs en joies. Ici les mots font que l'on plie et déplie l'espace à volonté. 

    La scène, sous leurs, pas se dévoile. Regardez d'un peu plus près. Il y a mille détails à voir. Chaque geste est une euphorie, un défi, une mise en abîme. Sous nos yeux, se révèlent les joies intactes des premiers jours. Les rêves se dessinent à tour de rôle. Il y a de la magie au coeur de ce groupe. Naît ainsi l'envoutement. 

    Saviez-vous que l'écriture de ce spectacle est un jeu entre eux et nous. Une envie, un saisissement ? Un jour vous viendrez voir ce spectacle et votre âme va se mettre à nager, entraînée par les tableaux créatifs choisis par les artistes. Une autre fois, vous reviendrez et il y aura une autre écriture, en fonction des joies solaires qui auront traversé leurs vies. Ainsi les âmes se mettent à nager. 

    Un corps se meut, nos âmes s'émeuvent dans l'espace commun du quotidien. La scène n'est qu'un prétexte à la rencontre, à la découverte d'artistes bouleversants, saisissants de générosité. 

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    Plus d'informations : 

    Danseurs : Lila Aldelmoumène, Alexis Bilanga, Marion Boudaud, Stéphane Bovery, Mehdi Cochener, Anne Guillemot, Nadia Jeremie, Karim Lachal, Christophe Larchet, Christine Leroy, Christian Nguyen, Sébastien Schmidt

    Éducatrice au foyer de Fleury : Mélanie Chavy

    Direction artistique : Kathy Mépuis

    Dramaturgie et création lumières : Marylin Alasset

    La Possible Échappée

     

  • Une actrice

    AFF-UNE-ACTRICE.jpgPar où devons-nous commencer ? Par le froid qui brûlait les joues, hier, de tous ceux qui attendaient le début de la pièce Une Actrice  ? Par une journée qui bascule d'un univers à l'autre ? Par les mots, sans doute, par ces mots étranges que nous portons tous les jours avec nous. 

    Ces mots qui nous les a mis en bouche ? Un auteur, un narrateur, nos expériences, nos désordres, nos fêlures... 

    Une porte s'ouvre, on annonce l'entrée en salle. Les esprits se libèrent, les corps se meuvent dans ce théâtre. "Ce soir, c'est un peu un rendez-vous de famille" lance Philippe Tesson en introduction. Une famille unie par les mots...

    "Les mots sont les passants mystérieux de l'âme" disait Victor Hugo. Ils apparaissent comme des chimères, disparaissent comme des dieux.

    Les mots sont ici, ceux de Philippe Minyana. Il signe un texte vif, incisif qui défie les années, les mécaniques mémorielles. Une poésie pure. Ils chantent le printemps, enchantent la nuit, soulèvent des paradoxes. Et vous vous souvenez-vous de ce "dos", de cette "tasse brisée", de l'odeur des "nappes en plastique" ?

    Non et pourtant ne sentez-vous pas ce doux parfum de fleur d'oranger ? La caresse de cette lumière de printemps qui s'attarde ?

    Fermez les yeux. Laissez-vous emporter. Les mots sont aussi ceux de Judith Magre. Elle est l'Actrice. Avec une majuscule. Elle traverse l'histoire avec son amour des mots, ses histoires d'amour, ses valses avec Max Ernst, les cheveux au vent avec les poètes. Depuis toujours, elle s'habille de mots. L'élégance de la scène lui va si bien. 

    Ah les mots, ce ne sont que des mots...

    Des mots sans fin, sans suite...

    Pierre Notte accompagne Judith dans les souvenirs. Il joue l'auteur, il veut sa biographie de l'actrice. Mais qu'est-ce qu'une actrice ? 

    Un ensemble de mots jetés, projetés, criés, aimés, chahutés, brisés, crachés, dégueulés en bord de scène... Encore des mots toujours des mots. Les mots qui dessinent le personnage.

    Un mot c'est une goutte de parfum dans l'espace de l'altérité, semble nous suggérer du bout des lèvres Judith Magre. Mais ne serait-ce pas encore les mots de l'auteur Philippe Minyana ?

    Je sais ce qu'il va me répondre "vous les philosophes, vous vous sortez de tout"... Nous les philosophes, nous sommes aussi des joueurs de mots, des briseurs de concepts, des empêcheurs de tourner en rond. Nous écoutons leur mélodie, en dessinons les contours historiques, nous les fracassons ou plus poétiquement les déconstruisons.

    Dans l'intimité du Théâtre de Poche, en jouant sur les mots, en caressant le sens du monde, se dessine sous nos yeux un témoignage fabuleusement étrange. Simultanément proche et lointain. En venant écouter des mots, nous réenchantons collectivement le monde. Nous résistons. Nous tissons ce lien pour éviter la dispersion comme la disparition progressive du langage.

    Une Actrice c'est tout cela à la fois : une poésie, un combat pour être soi et affirmer sa place d'artiste. Une Actrice c'est, au-delà des mots, une Artiste.

     

     

    AFF-UNE-ACTRICE.jpgDe Philippe MINYANA - Mise en scène Pierre NOTTE

    DU 20 MARS AU 20 MAI 2018 - Du mardi au samedi 21h, dimanche 15h

    Avec : Judith MAGRE, Pierre NOTTE, Marie NOTTE

    Lumières Éric SCHOENZETTER

    Tarifs à partir de 19 € / 10 € (-26 ans)

    Durée 1h15

    Production La Compagnie des gens qui tombent Coproduction Théâtre Montansier à Versailles et coréalisation Théâtre de Poche-Montparnasse

    Site du Théâtre de Poche